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Nicolas Pelorson nous raconte ses premiers essais dans « Alphane » 9A

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Sur un coup de tête, Nicolas Pelorson, l’un des meilleurs bloqueurs français, décidait il y a quelques jours de se rendre en Suisse le temps d’une semaine, afin d’essayer le bloc qui défraye actuellement la chronique : « Alphane » 9A.

Ayant déjà enchaîné et décoté deux précédents 9A bloc (« No Kpote Only » et « Soudain Seul »), Nicolas est l’un des grimpeurs français les plus expérimentés dans ce niveau de difficulté. C’est donc tout naturellement que nous sommes allés à sa rencontre, afin d’avoir son avis sur « Alphane ».

Alors, comment se sont déroulés ses essais dans l’un des blocs les plus durs de la planète ? Nico Pelorson nous dit tout !

Salut Nico. J’imagine que la première fois que tu as vu « Alphane », c’était dans la vidéo de Shawn Raboutou. Qu’est-ce que tu t’es dit en voyant cette ligne ?

Oui en effet, c’est par la vidéo de Mellow que j’ai découvert la ligne. J’étais vraiment comme un dingue quand j’ai appris qu’il existait un nouveau 9A bloc si proche de la maison, dans un endroit facilement accessible. J’ai directement eu envie d’aller voir ça !

Quels étaient les objectifs de tes premières séances dans ce bloc ?

Je ne savais vraiment pas à quoi m’attendre en terme de difficulté, alors je n’avais pas d’objectifs précis. En tout cas, j’étais quasiment sûr qu’un trip de six jours ne suffirait pas pour l’enchaîner. L’idée de ce séjour, c’était plutôt de voir quels étaient les mouvements clefs du bloc pour pouvoir m’entraîner spécifiquement à la maison et revenir plus fort.
Finalement, j’ai réussi rapidement les mouvements et j’ai fait aussi quelques belles connexions qui me laissent à penser que c’est envisageable dans un futur assez proche.

D’après les premiers ascensionnistes, la ligne est incroyablement belle. Comment la trouves-tu personnellement ?

La ligne est magnifique. Elle raye de droite à gauche un gros panneau à 70°, c’est incroyable ! En plus de ça, c’est génial à grimper. Les mouvements sont super athlétiques et pas du tout traumatisants. Grimper dans ce bloc, c’est juste du plaisir et très peu de souffrance (ce qui est loin d’être le cas pour tous les blocs durs).

Raconte-nous ton processus de travail quand tu découvres un bloc dur comme celui pour la première fois ?

Quand on arrive sur un bloc très dur, l’erreur à ne pas faire et de vouloir essayer tous les mouvements dès le début. À vouloir tout essayer en même temps, on ne cale rien et on se fume pour les jours suivants. Il est bien plus judicieux de sélectionner deux ou trois mouvements et d’essayer de les maîtriser avant de passer à la suite. La première séance, je me suis focalisé sur les deux ou trois mouvements qui me semblaient les plus durs, au milieu du bloc. Une fois ces derniers biens calés, je suis passé aux mouvements du dessous (un poil plus simples). Ensuite, dès lors que les mouvements étaient calés, j’ai essayé de les assembler.

Comment se sont passés tes essais au fil de la semaine ?

Une fois les mouvements maîtrisés, le plus logique pour ce bloc est de le travailler avec la méthode du « low point ». C’est-à-dire que, plutôt que de partir du bas et d’essayer d’arriver le plus haut possible, on part d’un point défini au milieu du bloc et on essaye d’arriver à la fin de la partie difficile. Une fois cet objectif atteint, on peut alors descendre le point de départ pour rajouter un ou deux mouvements à ce que nous avions déjà enchaîné. Il convient ensuite de descendre ainsi petit à petit le point de départ jusqu’à se retrouver dans le début du bloc. Cela permet de garder toujours un petit objectif intermédiaire et de ne pas tomber toujours au même mouvement. C’est beaucoup plus motivant !
L’idée finale, c’est de suffisamment maîtriser le bloc pour n’avoir à mettre que très peu de runs depuis le bas.

Quel a été ton meilleur run ?

J’ai enchaîné plusieurs fois toute la partie dure du bloc en partant du 4ème mouvement. J’étais assez proche d’y arriver en partant du 3ème mouvement mais je n’y suis pas parvenu ce coup-ci.

Tu nous disais avoir réussi rapidement à faire tous les mouvements, sauf un qui te posait problème. As-tu finalement réussi à le déchiffrer ?

Il y a un mouvement très étrange avec plusieurs méthodes possibles. Certains (comme Shawn Raboutou et William Bosi) arrivent à faire tenir un talon très précaire et à aller dans une pockette main gauche. Mais pour beaucoup (moi y compris), le talon ne tient jamais. Problème de chaussons, de gainage ou de force dans la main droite… Je ne sais pas trop, mais ça rend fou.
Heureusement, d’autres méthodes sont possibles pour ce mouvement si particulier, mais je peux vous dire qu’elles ne sont pas cadeaux… Moi, j’ai opté pour une méthode avec un gros ballant. À la fin, j’arrivais bien à le faire intrinsèquement, mais ça coûte quand même pas mal !

Penses-tu avoir des lacunes physiques et/ou techniques pour faire ce bloc ?

Il faut bien avouer, physiquement je suis un peu ric-rac… Faut dire que du panneau aussi déversant, ce n’est pas trop mon style de prédilection. Mais à force de travail, je commence à faire un peu moins de la peine dans ce style. Heureusement, j’arrive toujours à compenser avec mes doigts et ma souplesse.

Quelle est pour toi la clé mentale pour réussir à faire ce bloc ?

Comme pour tous les blocs durs, il faut rester calme et patient et toujours rester ouvert à un changement de méthode.

Tu as déjà enchaîné (et décoté) deux précédents 9A. Comment compares-tu « Alphane » à ces deux blocs ?

Dans le style, ça ressemble un peu à « Soudain Seul », à savoir de l’endurance de force sur des mouvements pas extrêmes dans du gros dévers. « Soudain seul » et « Alphane » ont en commun que leur mouvement le plus difficile ne doit même pas valoir 7C bloc à lui seul. « No Kpote Only » c’est bien plus court mais les mouvements sont autrement plus difficiles.

Est-ce le bloc le plus dur que tu aies essayé ?

Ayant déjà essayé les projets de Charles Albert à Fontainebleau, je peux vous dire que c’est très loin d’être le bloc le plus dur que j’ai essayé.

Il y a quelques jours tu nous disais qu’il te fallait encore une ou deux séances pour te prononcer sur la cotation. Peux-tu maintenant nous en dire plus ?

Je commence à avoir un peu d’expérience dans les 8C et 8C+ et ça me paraît quand même être une autre paire de manches cet « Alphane ». Pour moi, il faut empiler deux 8B+ bloc coup sur coup, ce qui correspondrait au niveau d’un petit 9A bloc. « Soudain Seul » est à mon sens un petit peu plus facile car il suffit d’enchaîner un 8A+ bloc suivi d’un 8B+ bloc.

À quand ton retour en Suisse ?

J’aimerais beaucoup y passer au moins deux semaines cet hiver, histoire d’avoir une vraie option pour l’enchaînement. Je vais voir en fonction de mes vacances et de mon budget (ce n’est pas donné la Suisse héhéhé). Peut-être en février ou en mars 🙂


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Publié le : 23 novembre 2022 par Nicolas Mattuzzi

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