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Nico Pelorson nous raconte l’histoire de l’enchaînement de « Soudain seul »

© Arthur Delicque

Fin mars, le bloqueur français Nico Pelorson réalisait « Soudain seul » à Bleau, version en départ assis de « Big Island » que Simon Lorenzi libérait quelques semaines plus tôt en estimant la cotation à 9A bloc. Malgré les 2 ans de travail acharné, Nico proposait de ramener la cotation à 8C+, et de manière très humble puisque son argument principal était de dire que d’autres grimpeurs ont fait des blocs plus durs que lui dans le monde. Ne se considérant ainsi pas comme l’un des meilleurs bloqueurs du monde, Nico ne pouvait se résoudre à laisser la cotation à 9A. 

Pour en apprendre un peu plus sur le long chemin qui a mené Nico Pelorson à la réalisation de ce bloc mythique, nous sommes allés à sa rencontre. 


Quand as-tu mis les chaussons la toute première fois dans « Big Island » ? Quel a été le processus pour venir à bout de la version en 8C ?

La première fois, c’était en 2018. A cette époque, je voulais faire le départ debout du bloc en 8C. Je l’ai réussi en 3 séances alors je me suis dit que je pouvais être un bon candidat pour le départ assis qui était à l’époque un projet.

Qu’est-ce qui t’attirait dans ce bloc ?

Déjà j’adore l’endroit ! C est une petite placette ensoleillée qui comporte un gros bloc (Big Island) qui, lui, est à l’ombre. En plus, le bloc est vraiment sympa a travailler. Ce n’est pas un bloc d’un unique mouvement où l’on fait que échouer au même endroit. Là, le mouvement le plus dur du bloc doit avoisiner le 7B bloc (je sais c’est dur à croire mais c’est bel et bien vrai).

Après avoir enchaîné le 8C, tu as tout de suite pensé à te lancer dans la version en départ assis ? Pourquoi ?

Trouver un bloc pile dans son niveau max (ni trop dur, ni trop facile) n’est pas chose facile. Après avoir fait le départ debout, je savais que j’avais au moins les capacités pour me battre dans un tel projet compte tenu du fait que les mouvements permettant d’aller du départ assis au départ debout avaient pour réputation d’être plus simples que ceux du départ debout.

© Arthur Delicque

Cette version assise aura été ton projet pendant 2 ans, comment fait-on mentalement pour tenir aussi longtemps? Qu’est-ce qui a été le plus difficile pour toi ?

On peut aussi voir ça comme 2 ans à essayer l’un des plus beaux blocs du monde dans un endroit paradisiaque…en réalité c’était plutôt sympa. C’était ma p’tite routine d’aller à Big, mettre mes petits essais, discuter avec les potes qui essaient aussi le bloc. Le plus dur peut etre, c’était sur la fin quand j’étais très proche de le faire et que les températures commençaient doucement à remonter. Là, je n’avais quand même pas envie de repasser une troisième année dedans.

Tu as l’air d’être plutôt attiré par les projets sur la durée, et moins par les réalsiations à-vue ou flash, expliques nous…

Oui j’aime bien accomplir des gros projets qui demandent de l’investissement. La fructification de tout l’investissement, c’est ce qui me procure le plus de bonheur. Et puis dans un gros projet comme ça, simplement le fait d’aller un peu plus haut que la fois dernière, ça me rend tout aussi content que d’enchaîner quelque chose de difficile. Après, le à-vue, même en bloc, j’adore aussi. Grimper a l’instinct, faire ce qui nous semble logique… c’est trop cool! Le flash je suis moins fan mais plutôt bon dans l’exercice je pense.

Après l’enchaînement de « Soudain seul », qu’est-ce que tu t’es dit ? Qu’est-ce que tu as ressenti ?

Un immense bonheur bien sûr. Après, je crois que j’ai mis quelques minutes à réaliser l’affaire. C’était tellement devenu une routine d’aller au bloc, de rentrer bredouille en se demandant sur le chemin du retour quel jour je pourrais y retourner… Là, se dire que ça y est, le bloc est fait et je n’allais plus retourner à cet endroit, ça m’a fait un peu bizarre.

Dans l’une de tes vidéos on voit que la première personne que tu veux prévenir après l’enchaînement, c’est ta maman, pourquoi ?

Elle m’emmenait grimper partout quand j’étais p’tit pour me faire plaisir alors il faut bien dire qu’une grande partie de mon niveau actuel, je lui dois. Pouvoir grimper beaucoup en étant jeune, c’est tellement important pour développer des qualités qui persistent je pense. Et puis je trouve ça stylé d’appeler la darone plus que d’appeler une énième personne qu’on voit souvent !

© Arthur Delicque

Lors de cet appel à ta maman, tu parles cotation, et on t’entend lui dire « non mais maman, c’est très dur mais je sais qu’il y en a qui ont fait plus dur que ça », d’où vient cette humilité ? Tu ne te considères donc pas comme l’un des meilleurs bloqueurs de la planète ?

Je ne suis pas forcément humble mais plutôt réaliste et franc quand à mes capacités et sur le fait que je doute fort que « Soudain seul » soit le bloc le plus dur du monde (ou un de ceux…). J’ai reçu beaucoup de critiques sur le fait que je décot’ le bloc. A titre personnel, je n’ai aucun intérêt à décoter un tel bloc. Je serais bien plus reconnu (et riche !!!) en disant que je suis le seul à avoir fait deux 9A bloc (« Soudain seul » et « Nokpote only »). Mais ce n’est pas la vérité et je le sais très bien au fond de moi alors je préfère être franc avec moi même. Du reste, je ne sais pas comment je me considère. Je suis ma p’tite vie où je fais les p’tits blocs qui me motivent, je finis mes études de kiné, je m’entoure de ceux qui comptent pour moi… je ne me prends pas trop la tête avec ce genre de question.

Penses-tu pouvoir encore repousser tes limites ? As-tu un nouveau projet en tête ?

Je pense pouvoir faire un peu plus dur, notement en voie. D’ailleurs, je compte m’investir plus dans les les voies dès mes études de kiné sur Paris terminées (dans 1 mois!!!). Mon prochain projet : la Dura Dura (9b+). J’y ai passé deux semaines cet hiver et c’est assez prometteur.

Un dernier mot à ajouter ?

« On n’écoute pas les critiques… faut jamais écouter les critiques ! »

Publié le : 05 mai 2021 par Charles Loury

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