La préparation mentale du grimpeur, kezako?
La prépa mentale, tout le monde en parle, mais cette pratique reste encore trop peu développée, notamment en escalade. C’est pourquoi, en partenariat avec Jonathan Bel Legroux, nous allons lancer une série d’articles dédiés au mental. Histoire de bien commencer, on démarre avec un petit dossier sous forme de questions/réponses afin de refaire le point sur ce qu’est la prépa mentale.
Qu’est ce que la prépa mentale ?
La préparation mentale c’est un ensemble de techniques qui visent à optimiser l’état d’esprit, les habiletés cognitives et les prises de décisions du grimpeur. Mais c’est aussi un domaine qui cherche à proposer des solutions par rapport à la gestion des émotions, comme celle de la chute, de la pression en compétition, ou de la réussite lorsqu’on est dans les derniers mouv’ d’un projet…
En France, on y trouve différentes techniques : la sophrologie, l’hypnose, la PNL, l’autohypnose, la visualisation… Mais qu’importe l’outil, c’est l’efficacité qui va nous importer. Seulement voilà, souvent, on s’intéresse à ce domaine lorsque le mental n’est plus à « préparer », mais plutôt à « réparer ». Coach mental depuis plus de 12 ans, auteurs de deux livres sur le sujet, et travaillant avec des centaines d’athlètes pros, dont des grimpeurs bien entendus… Voici mon conseil : hacker le système, et entrainer votre mental plutôt que de le préparer !
Pourquoi en faire ?
Souvent, c’est lorsque plus rien ne va qu’on s’intéresse à ce domaine. Pourtant, avant de commencer à grimper, avant de travailler les « skates de l’espace », les « dynos », les tractions à un bras, il a fallu d’abord dépasser les émotions et les appréhensions de peur de la chute par exemple, puis développer les prises de décisions, la lecture… Tous ces savoirs sont des briques d’une seule est même maison : le mental. Au début, c’est le mental, porté par l’envie et le plaisir souvent, qui nous pousse à continuer de grimper. Puis plus tard, on développe d’autres facteurs de l’entrainement. Jusqu’à arriver à un palier. Si les choses étaient bien faites, on continuerait d’entretenir l’envie, de lever les appréhensions, on continuerait de croire que tout est possible et accessible. Mais souvent, ce n’est pas le cas. Et c’est là que des experts du mental interviennent. Ce qui est une bonne chose. Mais, je reste convaincu que le premier coach mental du grimpeur ce doit être le grimpeur.
Après, c’est vrai qu’il peut être utile des fois d’être deux pour réfléchir à une stratégie de prise de décision à améliorer, à l’utilité d’une émotion. Souvent, ce qui a amener les grimpeurs à faire appel à moi c’est cette phrase : je sais que je peux faire plus, être plus fort, mais mon adversaire, c’est moi, et je ne sais pas comment faire.
Et oui, l’escalade ce n’est pas grimper. C’est faire parfois taire la partie de nous qui croit qu’on y arrivera pas. Grimper ce ferait souvent plus simplement si il n’y avait pas cet adversaire intérieur.
Celui qui apporterait les pensées parasites, les émotions de colère, de pression, cette envie d’être parfait en compétition comme à l’entrainement, ce besoin de contrôler même ce qu’on ne peut pas… Et bien voilà pourquoi entrainer son mental. Car il n’est pas que cette facette là. Il est aussi cette facette de vous qui rêve de progresser, d’aller plus haut, de passer une après midi à l’ombre des blocs, de voyages et de big wall.
L’entrainer régulièrement c’est rester en paix à l’intérieur pour n’avoir qu’un mur à affronter, ce qui est déjà largement suffisant.
Comment ?
Avec des outils simples. Que vous pouvez lire, apprendre. Pour ma part, j’en ai mis plus d’une centaine dans mon prochain livre (L’incontournable de l’autohypnose pour la performance » aux Editions Amphora). Mais avant tout avec ce que nous avons dans notre tête (et je ne pense pas au cerveau) : l’ensemble des images et des idées remémorées ou imaginées que nous avons.
Notre imaginaire est fort, très fort. Il peut cloué au sol un grimpeur, si celui-ci croit profondément à la chute. Notre vie de grimpeur est remplit de scénarios catastrophe qui ne verront jamais le jour. Notre imaginaire, utilisé quand nous étions enfant pour apprendre et construire notre réalité, est mis de côté plus tard. Alors que celui-ci nous pilote plus que ce que nous pensons. Commencez à mettre les mains dans cette facette de votre entrainement : vous vous imaginez galérer sur un mouv’ ? Pourquoi ? Avez-vous choisi cette représentation ? Vous vous imaginez tomber ? Pourquoi ? Parce qu’on vous a parlé du crux ? Et si vous n’en aviez jamais entendu parlé, qu’auriez vous imaginé ?
Nous sommes remplit de « spam » mentaux, par les pensées qui viennent de nous ou des autres, les représentations. Devenir le pilote de votre mental va vous permettre d’être acteur plutôt que spectateur.
Un truc à tester au prochain entrainement ?
Testez ceci : Avant de partir dans un bloc, ou une voie, demandez vous quelle représentation de l’effort avez-vous en premier.
Puis demandez vous qu’est ce qui justifie cette projection mentale ? Ceci va vous donner des pistes sur vos références. Est-ce que c’est les autres qui vous ont aiguillé ? Est-ce que c’est vous-même ? Parce que vous vous dites quelque chose sur vous ? Votre gabarit ? Vos capacités ? …
Et si tout cela était faux ? Un peu à la Matrix, dans cette entrainement, imaginez que tout ce que vous pensez à ce moment là est ni faux, ni vrai. Imaginez « brouiller les images, atténuer le volume des pensées ». Et grimpez.
Prenez des notes sur cet entrainement là, pendant et sinon après.
Et tenez moi au courant de ce que vous avez trouvé de différent 😉
Bonne grimpe à tous et à bientôt pour un autre article.
Jonathan Bel Legroux | Insta : jbellegroux