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Interview : Symon Welfringer nous parle de « Pornographie », son premier 9a

Il y a quelques jours, le Français Symon Welfringer clippait à Ceüse, le relais de « Pornographie », son premier 9a. Nous sommes allés à sa rencontre pour en savoir un peu plus sur cette performance.


Symon, tu viens d’enchaîner ton premier 9a. Quel est ton ressenti ? Tu réalises ?

C’est un mélange de deux émotions. D’un côté, il y a la fierté mêlée à la joie pure et intense d’avoir finalisé un projet à long terme ; et de l’autre, c’est un soulagement. Ça fait un bout de temps que je monte à Céüse et que je m’investis dans une voie dans le 9. Donc c’est soulageant de se dire que je n’ai pas investi tout ce temps pour rien. Le côté fierté vient aussi du fait que j’ai réussi “Pornographie”, mon premier 9a, malgré toutes mes expés en alpi et toute mon activité autre que la grimpe. Donc concilier tout ça c’était un peu un pari et je suis content que ça ait fonctionné.

Comment fais-tu pour garder ta motivation sur le long terme pour travailler une voie ?

Ma motivation perdure grâce au fait que je change assez régulièrement de vision et d’objectif. J’ai toute une partie de l’année où je suis à fond dans l’alpinisme, la cascade de glace et les expés en altitude, ce qui fait que la partie de l’année que je dédie à l’escalade en grande voie, trad et couenne est assez réduite. Le fait de régulièrement changer d’activité, ça fait que je ne m’ennuie jamais et dès que je sens que je suis plus à fond quelque part, j’alterne et je vais voir ailleurs.

Mais j’ai dû me forcer un peu pour pouvoir enchaîner ce 9a. Donc je continuais à grimper même quand j’en avais marre, et c’est de là que vient la peur que tout cet investissement ne serve à rien. Le processus de travail de la voie c’est une combinaison de plein de moments de joie, mais il y a vraiment des moments durs quand tu fais des séances où tu n’avances pas, où tu es super frustré et énervé. J’ai donc vraiment dû me forcer pour enchaîner “Pornographie”.

© Arthur Vaillant

Pourquoi avoir choisi “Pornographie” comme première voie dans le neuvième degré ?

Le premier critère, c’est que je voulais faire mon premier 9a à Céüse. Selon moi, c’est le plus beau site de grimpe de France, si ce n’est du monde. C’est un peu en montagne, avec une petite approche, l’ambiance y est vraiment plaisante, j’adore y aller sur de longues périodes avec mon camion et y passer du temps. Du coup, je tenais à faire mon 9a là-bas et c’est pour ça qu’au départ, je me suis lancé dans “Le Cadre” qui une autre voie juste à côté de “Pornographie”. Donc pendant deux ans j’ai essayé de l’enchaîner, mais c’était assez frustrant, parce que j’étais très proche mais je n’arrivais pas à m’exprimer dans la voie. Du coup, j’ai commencé à essayer “Pornographie” qui venait d’être ouverte et pour garder la motivation je me suis mis à alterner entre les deux, jusqu’au moment où je me suis senti beaucoup plus proche dans Porno, alors j’ai décidé de laisser “Le Cadre” de côté.


En toute honnêteté, j’avais peu d’espoirs quant au fait de l’enchaîner ce jour-là, ce qui m’a permis de grimper relâché et de doser l’effort jusqu’au bout. »


Peux-tu nous décrire la voie ?

Porno, c’est une voie qui est hyper ludique. Les mouvs sont assez durs, très axés sur de la tenue de prise, mais ils sont hyper sympa, avec une gestuelle dynamique, faut aller chercher loin, mais pas trop, il y a des talons, beaucoup de placements… Donc c’est hyper complet et plaisant à grimper. Il n’y a que deux petits repos assez mauvais dans la voie, donc elle est hyper rési, avec une seconde moitié assez dure où la difficulté des mouvements reste assez similaire au reste de la voie, mais le fait de les enchaîner rend la chose compliquée. Du coup même si tu n’as pas le niveau d’enchaîner la voie, les mouvs sont hyper cool, ce qui la rend sympa à travailler.

Comment te sentais-tu pendant l’enchaînement ? Quel était ton état d’esprit ?

De manière générale, je me mets beaucoup la pression dans mes débuts de runs, donc je suis très tendu dans les premiers mouvements et, souvent, la clé de l’enchaînement dépend du moment où je vais réussir à me détendre. Typiquement, le jour de l’enchaînement j’ai réussi à me relâcher au repos du milieu et à me dire “fais toi plaisir, t’es en forme, profites-en et ne pense à rien d’autre”. Donc je n’avais pas d’attente sur ma grimpe et, en toute honnêteté, j’avais peu d’espoirs quant au fait de l’enchaîner ce jour-là, ce qui m’a permis de grimper relâché et de doser l’effort jusqu’au bout.

En 2021, tu as fait une chute de 50m lors d’une sortie en cascade glace. Comment se relève-t-on d’un tel accident pour recommencer à grimper à haut niveau et retourner en expédition ?

Cet accident m’a beaucoup fait réfléchir et j’ai mis pas mal de temps avant de reprendre l’alpi. Mais en me posant les bonnes questions, ce qui ressort, c’est que m’investir dans des projets de grimpe, d’alpi et de voyages me rend heureux . Je sais que je ne ferais pas ça toute ma vie, c’est certain, mais pour l’instant j’ai encore beaucoup d’idées à mettre en place, et c’est ça qui m’anime.

Tu es un grimpeur et alpiniste qui ne cesse d’impressionner. Quels sont tes projets pour la suite ?

Cet été j’ai pas mal de projets en grande voie et en alpi un peu partout dans les Alpes et je vais essayer de repartir au Népal vers mi-septembre pour tenter de monter à 7500m et refaire un peu de mixte en Himalaya.


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Publié le : 01 juillet 2022 par Vadim Simonneau

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