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Analyse des OQS : l’oeil d’ouvreur de Rémi Samyn

© Lena Drapella

Rémi Samyn, chef ouvreur des Championnats du Monde de Berne l’été dernier, faisait partie de l’équipe d’ouvreurs du premier OQS de Shanghai. Il a accepté de revenir pour nous sur cet événement semé d’embûches : entre un chef absent, des difficultés liées à l’organisation, la blessure d’un membre de l’équipe et des aléas climatiques désastreux, vous découvrirez que l’ouverture de cette compétition a été un véritable challenge !

Deuxième opus de notre série d’interviews consacrée aux Olympic Qualifier Series de Shanghai. Après l’œil de l’entraîneur offert par Laurent Lagarrigue, nous vous apportons maintenant la vision de l’ouvreur, à travers le regard aiguisé de Rémi Samyn.

Rémi était l’un des huit membres de l’équipe d’ouverture en bloc à Shanghai. Après avoir brillé en tant que chef ouvreur lors des Championnats du Monde de Berne en août dernier, il a été choisi par l’IFSC pour intégrer l’équipe qui sera en charge des Jeux Olympiques. Et pour que ce groupe se fasse la main et apprenne à travailler ensemble, la fédération internationale a nommé sur les OQS les mêmes ouvreurs que ceux qui œuvreront sur les J.O. Ainsi, l’équipe de Paris sera la même que celle des OQS de Budapest et Shanghai.

Et cette première échéance a réservé son lot de surprises à nos ouvreurs ! Les imprévus se sont multipliés au fil de la semaine, engendrant un retard considérable. L’équipe a donc dû s’adapter face à ces événements inattendus, qui ont rendu l’ouverture plus compliquée que prévue.

Rémi Samyn nous raconte cette semaine intense et les nombreux défis qu’il a dû relever.


Hello Rémi, tout d’abord comment s’est déroulée la semaine d’ouverture sur cet OQS ?

De manière globale, elle a été très difficile pour nous ! C’est une mission qui a duré dix jours, aux cours desquels les péripéties ont été nombreuses. On a accumulé les imprévus et les galères, ce qui nous a fait prendre du retard au fil de la semaine. Tout a commencé dès le premier jour, où l’on prenait déjà du retard sur le planning, à cause de conditions météos désastreuses, d’une tonne de matériel à déballer, etc etc.

Deuxième imprévu : notre chef ouvreur, l’Américain Garett Gregor, a eu des problèmes de visa. Il n’est arrivé que la veille de la compétition ! Nous étions donc un de moins dans l’équipe et pas des moindres : c’est le chef qui était absent, celui qui était censé tout coordonner. Je vous laisse donc imaginer à quel point l’organisation a été compliquée…

Troisième galère : un ouvreur s’est blessé dès le deuxième jour, après seulement une heure de grimpe. Tout cela réunit a fait qu’on s’est retrouvé dans le jus très vite ! On s’est bagarré contre le temps pendant les dix jours d’ouverture. On a lutté, lutté, lutté, devant parfois faire des choix que l’on aurait aimé ne pas avoir à faire. En bref, c’était une semaine compliquée !

Comment avez-vous abordé cette compétition avec l’équipe ?

Pour chacun des membres de l’équipe, cette compétition était la première de l’année. Nous étions donc tous très motivés ! Mais les imprévus qui nous sont tombés dessus dès le premier jour ont créé de la désorganisation, ce qui a mis un peu de flottement au début du processus.

Malgré cela, nos objectifs étaient de proposer la meilleure compétition possible et arriver à s’adapter très vite et de manière efficace face aux nombreux aléas qui ont perturbé notre travail tout au long de l’événement.

T’es-tu servi de ton expérience acquise lors des Championnats du Monde de Berne l’été dernier ?

Bien sûr ! Quand tu as une expérience comme celle-ci, tu t’en sers dans tout ce que tu fais par la suite. Ce format combiné (qui rappelons-le est un format très spécial au niveau de l’ouverture, avec deux zones par bloc et donc trois étages) je le connais par coeur maintenant ! Je fonctionne complètement différemment quand il s’agit de tracer des blocs pour le combiné. Par exemple, il y a de plus en plus de blocs que je commence à tramer par la fin. Ce sont des petites choses comme ça, propre à ce format spécifique, avec lequel je suis de plus en plus familier.

Alors oui, tout ce que j’ai vécu à Berne me sert et me servira encore cette saison. Mais d’un autre côté, à Shanghai, je n’étais pas dans la position de chef, ce qui est tout de même bien différent. J’ai essayé de respecter cette position et de rester dans ce rôle qui m’a été confié, il y a donc toute une partie de mon expérience des Championnats du Monde que je n’ai pas vraiment exploité. On va dire que j’ai utilisé 50% de ce que j’ai appris à Berne et que les 50 autres sont restés de côté étant donné que je n’avais pas la même position.

Que retiens-tu de cette première manche des OQS ?

Ce que je retiens du point de vue de l’ouverture (je parle pour l’équipe de bloc, dont je faisais partie), c’est qu’on a beaucoup de progrès à faire. On a proposé une compétition dont je ne suis pas entièrement satisfait. Disons qu’elle était imparfaite : certains tours ont bien fonctionné, d’autres un peu moins. L’avantage, c’est qu’on a identifié pas mal de points sur lesquels on va pouvoir s’améliorer.

Je retiens aussi qu’il a fallu s’adapter quant au niveau des compétiteurs. Le niveau était clairement différent de celui des Championnats du Monde de Berne, car les meilleurs sont déjà qualifiés pour les Jeux et ne disputent pas ces OQS. Certains pays ont également atteint leur quota, comme le Japon, qui n’a envoyé aucun de ses compétiteurs chez les hommes. Tout cela fait que le niveau sur ces OQS est très différent du niveau habituel. Cela nous a permis de nous donner des repères, qui nous serviront clairement pour Budapest.

© Marc Daviet

La compétition s’est-elle déroulée comme vous le souhaitiez ?

Oui et non. Non, car comme je le disais plus haut, on a eu plein d’imprévus au cours de la semaine d’ouverture. Mais si on regarde les résultats, les qualifications ont fait le job au niveau du classement. Les demi-finales étaient plutôt bien pour les hommes et c’était un poil facile pour les femmes. Les finales n’étaient pas terribles, mais on a lutté comme on a pu avec les aléas, qui ont pas mal impacté notre travail.

Y-a-t-il quelque chose qui t’a particulièrement surpris durant cette compétition ?

Oui : tous les imprévus qu’il a fallu gérer ! Par exemple, nous n’avions qu’une seule journée pour ouvrir les blocs de qualification à cause du retard accumulé. À 10h00 (une heure seulement après qu’on ait commencé), une grosse tempête de vent a frappé Shanghai et a arraché le rideau qui protégeait le fronton de bloc. Résultat : jusqu’à 15h00 nous ne pouvions plus travailler. On n’a donc eu que six heures pour visser toutes les qualifications !

Je ne suis qu’à moitié surpris car je sais que sur tous les gros événements comme celui-ci, il y a toujours des imprévus qui viennent chambouler le programme. Par contre, tu ne sais jamais ce qui va t’arriver, ni à quel moment, ce qui demande de s’adapter en permanence.

© Lena Drapella

Avez-vous identifié des pistes d’amélioration à mettre en place à Budapest ?

Bien sûr ! Déjà, on aura une meilleure vision du niveau, ce qui nous permettra d’ajuster l’intensité de nos blocs. Et puis, l’une des principales pistes d’amélioration pour nous sera d’être mieux organisé à Budapest.

Vous servez-vous de ces OQS pour tester les grimpeurs sur certains points à quelques semaines des Jeux ?

Ça nous donne des repères de niveau, mais honnêtement, on sait très bien que de nombreux forts grimpeurs ne sont pas là. Disons que le top 10 mondial est quasiment déjà qualifié pour Paris. Donc il faut veiller à ne pas prendre le niveau sur ces OQS comme repères pour les J.O. Car à Paris, le niveau sera bien plus élevé !


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