Giuliano Cameroni enchaîne le départ assis de « Off the Wagon » 8C+ !
Le fort bloquer suisse Giuliano Cameroni est venu à bout de l’un des plus gros projets de sa vie: le départ assis de « Off the Wagon » 8C+. Un bloc qu’il projetait depuis plus de six ans !
En 2012, le finlandais Nalle Hukkataival signait la première ascension du célèbre bloc « Off the Wagon », caractérisé par un mouvement en no-foot, devenu emblématique. Six ans plus tard, le 27 novembre 2018, Shawn Raboutou faisait sensation en réalisant pour la première fois la version assise de ce bloc, donnant naissance au premier 8C+ suisse.
Jimmy Webb réalisait la première répétition de cette version assise, suivi rapidement par Daniel Woods, qui déclarait alors: « C’est l’une des expériences les plus exaltantes que j’ai eues dans ma carrière de bloqueur. La puissance, la précision et la détermination nécessaires à l’enchaînement sont difficiles à aligner à l’unisson. Cela s’est rapidement transformé en une bataille mentale. Il rentre dans le Top 3 des meilleurs blocs au monde requérant beaucoup de puissance selon moi. »
- Les images de Jimmy Webb dans la première répétition de ce bloc:
Après plus de six ans de travail, le suisse Giuliano Cameroni a réussi à signer la quatrième ascension de ce bloc hier. Petite particularité: alors que les Shawn Raboutou, Jimmy Webb et Daniel Woods sont partis assis depuis le wagon, Giuliano a préféré déplacer le wagon et partir debout depuis les mêmes prises, signant ainsi la première ascension depuis le sol: « je trouve personnellement le bloc plus joli comme ça » a-t-il déclaré.
- Il est revenu en détails sur ce long process et la façon dont il a géré mentalement ses essais:
Enfin ! 🙏 C’était un process très long, qui a duré 6 ans, rempli de hauts et de bas.
À force de passer son temps sur le même bloc, de nouveaux sentiments commencent à émerger : d’un côté, vous êtes évidemment frustré, surtout si vous vous êtes approché de très près de l’enchaînement, mais de l’autre côté, il y a un sentiment plus profond de connexion avec le lieu et le rocher, et une vraie petite histoire d’amour commence à naître. Vous commencez à connaître chaque détail du rocher par coeur: la sensation des grains sous vos doigts et la qualité de la roche en elle-même.
Le jour de l’enchaînement, un changement soudain s’est produit : j’étais assis en bas du bloc, comme toujours, prêt à me lancer, quand j’ai réalisé que j’avais alors le choix: m’amuser ou essayer désespérément de mettre un nouvel essai.
Cette prise de conscience m’a mis dans un super état mental, sans pensées négatives et sans peur d’échouer. Juste après cette pensée, je me suis lancé et j’ai raté le bac final. C’était mon meilleur essai en six ans, et au lieu de me mettre en colère, j’ai commencé à rigoler. Je savais que ma démarche était la bonne, alors je suis resté calme et heureux.
L’essai suivant, j’ai réussi. Toutes les pièces du puzzle se sont assemblées et tout à coup, je me suis retrouvé au sommet du bloc. Un grand sentiment de joie m’a envahi et je me souviens même m’être demandé comment cela avait pu être si facile, alors que j’avais essayé en vain pendant si longtemps…
Ce bloc m’a prouvé que l’escalade peut être bien plus que seulement atteindre le sommet. L’escalade, c’est une connexion profonde entre nous et la nature, entre notre âme et le calme de l’instant. C’est finalement très similaire au yoga, c’est pourquoi le mouvement parfait se trouve dans le moment présent. C’est seulement à partir de ce moment, lorsque toutes nos énergies sont concentrées sur ce que nous faisons, que nous pouvons grimper au mieux, que nous pouvons sentir ce que notre corps peut réellement faire et quel mouvement lui convient le mieux.
Dans cette dimension intemporelle, nous réalisons notre véritable potentiel, nous réalisons que nous pouvons grimper plus fort que ce qui semblait possible et donc dépasser nos limites. Nous réalisons également que l’escalade est une forme de méditation, un moyen direct de trouver le zen, un pont entre le physique et le non-physique. »