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Comment Pierre Rebreyend est-il devenu le nouveau Champion de France de vitesse 2024 ?

© François Le Rolland

Samedi soir à Anse, un nouveau grimpeur a ajouté son nom au palmarès des Champions de France d’escalade de vitesse. Son nom ? Pierre Rebreyend. En équipe de France seniors depuis 2018, Pierre fait partie des 30 grimpeurs les plus rapides au monde, et ne cesse d’améliorer son chrono au fil des saisons.

Son objectif cette année ? Rejoindre Bassa Mawem, déjà qualifié pour les Jeux Olympiques,pour représenter la France à Paris cet été. Pour cela, le jeune homme de 27 ans va devoir faire ses preuves lors des compétitions internationales sélectives qui approchent à grands pas. Une année 2024 qui s’annonce intense et qui a commencé de la plus belle des manières pour Pierre. Lors de la première compétition de la saison à Anse, il a remporté tous ses duels, allant même jusqu’à signer le temps le plus rapide de toute la compétition (5,33 secondes). De quoi être décoré de la plus belle des médailles pour la première fois de sa carrière.

Pourtant, Pierre a vécu un véritable ascenseur émotionnel durant la compétition. Comment est-il passé de l’envie d’abandonner à chanter la Marseillaise sur la plus haute marche du podium ? Après Capucine Viglione, il a accepté de prendre la parole à notre micro pour tout nous raconter.

Pierre ? C’est à toi !


« J’avais les jetons ! »

Cette année, je n’avais pas de gros enjeux sur ces Championnats de France car j’étais déjà sélectionné pour la plupart des Coupes du Monde et pour les compétitions sélectives pour les Jeux. C’est mon objectif premier cette saison : me qualifier aux Jeux Olympiques de Paris. Je prends toutes les autres compétitions comme des étapes afin de voir où j’en suis dans ma préparation et adapter mon entraînement en fonction de ces résultats.

En théorie, j’aurais donc dû arriver détendu et l’esprit léger à Anse pour le Championnat de France, car pour une fois, je n’avais pas d’enjeu de sélection, ce qui n’est quand même pas rien (c’est le truc qui me fait le plus peur à chaque fois que je viens aux Championnats de France !). Malgré tout, avec Capucine, nous étions dans les favoris et j’ai trouvé ça vraiment dur d’avoir ce statut. C’est quelque chose que je ne maîtrise clairement pas et il a fallu que je m’adapte tout au long de la compétition pour ne pas flancher et rester focus.

Alors ma première approche avant même que la compétition commence ? J’avais les jetons ! Ça faisait juste super peur et c’était paradoxal car je n’avais aucune raison d’avoir peur, c’est ce que mes coachs ne cessaient de me répéter.

Mais le Championnat de France est une compétition importante pour moi, car souvent, en début de saison, je ne suis pas très bon. Après des mois passés à s’entraîner, c’est difficile de quantifier le niveau que j’ai actuellement, parce que j’arrive à l’exprimer seulement lors des compétitions. Ces dernières semaines ont été assez dures, et mine de rien, j’avais besoin de faire un bon résultat sur ces Championnats de France pour me rassurer sur ma préparation. C’est peut-être pour ça que j’avais aussi peur en arrivant à Anse : j’attendais beaucoup du résultat et de mes chronos, qui allaient conditionner ma manière d’aborder le reste de la saison.

L’ascenseur émotionnel

Mes deux premiers runs de practise se passent plutôt bien. J’avance bien, ma grimpe est fluide, ce sont des runs tout à fait corrects. Mais d’un coup, ça a commencé à devenir très dur. L’espace d’un instant, j’ai même cru que j’allais abandonner. Je ne sais pas vraiment ce qui s’est passé dans ma tête, mais je ne le sentais pas. J’ai eu un énorme coup de flippe et je ne me voyais pas continuer la compet. Je me voyais rater tous les runs qui allaient suivre, je me suis mis une pression de dingue, je n’arrivais même plus à m’activer ! Il a fallu que je me remobilise, que j’aille chercher des trucs en moi pour me remettre dedans. Pour ce faire, j’ai rapidement appelé ma préparatrice mentale, et ça a clairement sauvé ma compétition ! Mentalement ça m’a remis dedans avant les qualifs, et c’était nécessaire !

© François Le Rolland

Et puis tout bascule !

Parlons des qualifs… J’ai complètement foiré mon premier run ! Mais je suis rentré dans la configuration de compétition qui me correspond le plus, à savoir devenir bon quand je n’ai plus le choix, que j’ai le couteau sous la gorge. Là, c’était le cas : il ne me restait plus qu’un run pour perfer. Allez savoir comment, ce genre de scénario fonctionne super bien pour moi. Tout s’est mis en place, et je suis allé vite dans mon deuxième run de qualification : je tape le buzzer en 5,46 secondes, c’est le meilleur temps des qualifications… Tout cela alors que quelques minutes avant, je me disais que c’était foutu ! Après ce deuxième run de qualif, j’étais remonté à bloc, plein de super bonnes énergies pour aborder la suite de la journée. J’avais vraiment envie de me faire plaisir en finale !

© François Le Rolland

Jusqu’au bout !

En finale, j’avais donc complètement changé d’état d’esprit ! J’étais reboosté à fond grâce à mon deuxième run de qualif et mon unique objectif était d’aller vite ! J’étais presque détaché du résultat que j’allais faire au classement, j’avais juste envie de grimper vite, de prendre un max de risques et de lâcher prise mentalement.

Mes runs en huitièmes et quarts de finale m’ont permis de bien prendre mes marques sur le mur à haute vitesse, et ensuite, lors de mes runs de demi-finale et finale, c’est là que j’ai lâché les chevaux. Et ça a marché ! J’ai eu beaucoup de chance en demi-finale, face à Guillaume Moro, où je suis passé à deux doigts de la correctionnelle ! Mais en analysant ma grimpe avec du recul, j’ai pris un super bon départ, je suis parti très très vite, et derrière, j’avais de super bonnes sensations sur le mur. Donc c’est chouette, car c’est ce que j’étais allé chercher : je voulais me prouver lors de ces finales que j’étais capable d’aller très très vite et que je pouvais faire des runs aux alentours de 5,30 secondes.

© François Le Rolland

Ce titre de Champion de France n’est pas celui pour lequel je me lève tous les matins, j’ai d’autres objectifs, plus ambitieux, mais il est tout de même très gratifiant. Ça me fait très plaisir de décrocher ce titre car ça fait plusieurs années que je passe à côté. Cette fois, j’ai réalisé un Championnat de France où j’ai globalement très bien grimpé, donc je suis bien content. Et puis, un titre de Champion de France ce n’est quand même pas rien !

Ça présage plein de bonnes choses pour le reste de la saison, ça me rassure et ça me motive à bloc pour la suite ! La saison est lancée, et ça va sharkler !

© François Le Rolland


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Publié le : 22 mars 2024 par Nicolas Mattuzzi

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