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L’excentrique: le meilleur moyen de progresser en force?

Cet article a été modifié, suite à un échange téléphonique avec un entraîneur qui ne l’interprétait pas de la même manière que moi. Vous trouverez quelques remarques en fin d’article.

« Excentrique »…un mot qui fait briller les yeux, ou qui fait peur ! Pourquoi ? Encore faut-il le définir, de manière assez simple. Il existe différents régimes de contraction musculaire. En escalade, on évoque souvent le concentrique, c’est-à-dire que le muscle se raccourcit lorsqu’il se contracte. C’est ce qui se passe au niveau de vos biceps lorsque vous faites une traction. A l’inverse, on parle d’excentrique lorsque le muscle s’allonge lors de la contraction. Exemple (à ne pas faire !) : vous bloquez à un bras en position haut, et vous freinez la descente.

La question posée est donc : est-ce que l’excentrique est le meilleur moyen de progresser en force ?

Petit historique rapide

Les recherches sur les méthodes excentriques datent des années 70, ce qui est finalement assez récent. Pour vous épargner les détails, c’est en 1972 qu’une étude montre qu’un entraînement en excentrique (6 contractions, 4 fois par semaine, pendant 7 semaines !) donne de meilleurs résultats qu’un programme comportant un travail concentrique. Mais encore faut-il connaître les charges (maximales ou non ?), et les effets à longs termes (plusieurs semaines après l’arrêt du cycle). Peu importe, dans ces année-là, on s’intéresse au sujet !

Depuis, les études se sont affinées, et les scientifiques sont en mesure d’expliquer ce qui se passe lors d’un tel effort.

L’activité électrique

Pour faire simple, un muscle est composé de différentes fibres. Et toutes les fibres sont innervées par les axones des nerfs moteurs. Si vous suivez toujours, chaque nerf moteur (ou motoneurone) innerve donc plusieurs fibres musculaires, et l’ensemble formé par un motoneurone et les fibres qu’il innerve est appelé Unité Motrice.

Je passe à la ligne, c’est plus reposant. A tension musculaire égale, la contraction excentrique nécessite moins d’activité électrique que les contractions concentriques. Ceci signifie donc que pour produire une tension équivalente, la contraction excentrique nécessite de recruter moins d’unités motrices ! Les unités motrices recrutées produisent alors chacune une force supérieure.

Les perturbations musculaires

Le travail excentrique est connu pour entraîner des lésions profondes dans le muscle : destructions importantes au niveau des myofibrilles, du tissu conjonctif, atteinte de la liaison tendon / muscle etc.

Récupération

Les courbatures après une première séance en excentrique sont beaucoup intenses que pour le concentrique (sur une échelle subjective de douleur musculaire, douleur 5 fois supérieure).

Sur du long terme, si un sportif effectue une 2ème séance d’excentrique 2 semaines après la 1ère, il ne ressent plus de courbaturees…Si cette 2ème séance a lieu 4, 5, ou 6 semaines après, même constat. L’effet de la 1ère séance est donc encore sensible 6 semaines plus tard ! Le travail excentrique nécessite une récupération très longue, évaluée à 6 semaines pour une séance intense. Pour un cycle de trois semaines, on parlera de…3 mois !

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Sur le terrain, est-ce que ça fonctionne ?

Oui, l’excentrique permet une prise de force importante (attention toutefois aux blessures si la méthode est mal utilisée…). 

Est-ce qu’il faut l’utiliser ?

Pour progresser en force, pourquoi pas, c’est efficace. Attention, il faut toujours le coupler à un travail concentrique (ce qui se fait souvent : 1 répétition à 120% en excentrique, puis 1 répétition à 80% en concentrique).

Progresser en force, oui. Et en escalade ?

A titre personnel, je pense que l’excentrique n’a pas sa place en préparation physique en escalade. Si on parvient à éviter les blessures, il existe aussi un autre inconvénient majeur, celui de perdre énormément (mais énormément !) en sensations. Vous savez, quand vos pieds et vos mains semblent faire leur vie de manière indépendante, ça fait à peu près ça….

Quels intérêts alors ?

En rééducation par exemple, à faible intensité. On peut ainsi réduire quelques tensions musculaires (on allonge les fibres musculaires en quelque sorte, avec le travail excentrique). Quant à l’entraînement, une séance bien placée d’excentrique pourra faire un petit nettoyage des fibres endommagées, pourquoi pas…

En résumé

L’excentrique est redoutable pour le gain en force, mais anti-grimpe ! Attention lors de vos circuits de rési, on voit parfois certains mouvements lors d’une « redescente » de boucle, ou le bras encaisse une belle décharge excentrique. Si vous faites 4 ou 5 fois ce mouvement dans la soirée, dites-vous que vous en avez à peu près pour 6 semaines pour retrouver votre biceps !

Alors, toujours motivé pour tester l’excentrique ?!

NLDA :

Cet article est une vulgarisation et ne s’adresse pas nécessairement aux professionnels de la préparation physique

Cet article n’a pas pour but de faire un état des lieux sur les connaissances en excentrique (avantages / inconvénients)

Le « non » m’engage pleinement, et mon avis n’a pas valeur d’exemple. Chacun doit se faire son idée. Il vaut mieux prévenir que guérir, alors si vous souhaitez vous lancer, faites-le en connaissance de cause et renseignez-vous auprès d’un entraîneur.

Enfin, donner son avis expose forcément à la critique, et je l’accepte volontiers depuis plusieurs années. C’est le jeu, et je suis ouvert à la discussion.

 

Thomas Ferry – Préparateur physique en escalade

 

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Publié le : 06 août 2015 par Thomas Ferry

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