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Voyage au cœur de Bishop : Nina Arthaud nous raconte son aventure américaine

© Coll. Nina Arthaud

Nina Arthaud revient tout juste d’un trip à Bishop, aux États-Unis, où elle a marqué de son empreinte deux blocs emblématiques : « Direct North » en 8B+ et « The Swarm » en 8B. De son arrivée dans le désert californien à ses réussites sur ces lignes mythiques, nous avons rencontré Nina pour qu’elle partage avec nous son expérience, ses impressions et ses objectifs futurs.

Voyage au coeur de Bishop avec Nina Arthaud.


Loin du stress des compétitions, Nina Arthaud continue de repousser ses limites sur le rocher. Lors d’un récent trip à Bishop, en Californie, la grimpeuse française a réalisé deux lignes iconiques : « Direct North » 8B+ et « The Swarm » 8B. Deux ascensions qui confirment son impressionnante progression depuis sa transition vers le rocher.

Avec ses blocs massifs posés au pied de la Sierra Nevada et ses lignes spectaculaires, Bishop attire les passionnés du monde entier. Pour Nina, ce voyage était une occasion rêvée de découvrir cet environnement unique et de repousser ses limites sur certaines des lignes les plus iconiques du secteur.

Quand j’ai vu pour la première fois des photos de Bishop, j’ai été très impressionnée par l’ampleur de ces énormes blocs posés un peu partout dans ce grand désert, avec un paysage incroyable en arrière-plan. Après ça, j’ai regardé plein de vidéos et j’ai découvert des lignes folles, qui me donnaient trop envie de grimper. Donc on a commencé à réfléchir au projet !

« Direct North » 8B+ : un highball d’exception

Perchée sur l’immense bloc de Grandma Peabody, « Direct North » est une ligne mythique du secteur de Buttermilks. Ouvert en 2009 par Shawn Diamond, ce highball propose un enchaînement de mouvements physiques et techniques sur des réglettes, avant de s’engager sur une dalle où l’engagement devient total.

Quand tu arrives sur le parking de Bishop tu vois les Peabody qui sont deux énormes blocs mythiques du spot. Grimper l’un d’entre eux du début à la fin, c’était quelque chose qui me motivait beaucoup. En plus de ça, la gestuelle du bloc est super stylée, avec des mouvements variés, plusieurs méthodes possibles selon les gabarits et une fin en dalle à 8-9 mètres du sol qui ajoute une petite touche épicée. L’ampleur de ce bloc et ce qu’il représente c’est quelque chose qui me plaît.

© Clement Lechaptois

Mais le processus d’enchaînement n’a pas été simple, entre rafales de vent à 180 km/h et conditions capricieuses. Pendant plusieurs jours, il était quasiment impossible de grimper, obligeant Nina à alterner entre patience et détermination. Une fois les conditions plus favorables, elle a pu s’investir pleinement, optimisant ses méthodes et apprivoisant la sortie en dalle. Finalement, après plusieurs essais acharnés, elle parvient à atteindre le sommet :

J’ai essayé ce bloc pour la première fois le soir en arrivant, juste après le trajet. J’ai rapidement bien bougé dedans et j’ai adoré les mouvements, donc ça m’a motivée à m’y investir. Mais les jours suivants, c’était presque impossible de grimper à cause des rafales de vent qui atteignaient les 180 km/h ! On montait voir, on essayait de grimper, puis après quelques heures à se faire brasser par le vent, on redescendait…

J’ai vraiment pu m’y remettre la deuxième semaine. Je suis montée mettre la corde pour essayer la fin en dalle et caler le dernier mouvement dur qui me posait problème. J’ai fini par trouver une nouvelle méthode qui me convenait bien, et après être tombée quelques fois au dernier mouvement dur, ça a marché !

© Coll. Nina Arthaud

À Bishop, grimper ne se résume pas seulement à cocher une nouvelle ligne : l’environnement spectaculaire offre à chaque enchaînement une saveur particulière. Depuis le haut du bloc, le regard plonge sur l’immensité du désert et les montagnes en arrière-plan. Un instant de pur bonheur pour Nina :

Au moment d’enchaîner ce bloc, j’ai ressenti beaucoup de joie ! J’étais trop contente d’avoir coché cette ligne incroyable. Ce que j’aime avec les blocs dans le désert, c’est qu’une fois au sommet, tu peux vraiment profiter de la vue sur tout le secteur et les montagnes derrière. En arrivant en haut, j’ai pris un moment pour respirer, regarder autour de moi… Je me sentais en paix et heureuse 🙂

Cette ascension marque le deuxième 8B+ bloc de sa carrière après « Compass North » à Fionnay, réalisé en octobre dernier.

« The Swarm » 8B : un rêve devenu réalité

Avant même son arrivée en Californie, Nina avait un objectif en tête : enchaîner « The Swarm » 8B. Situé sur un rocher isolé en plein désert, ce bloc ouvert en 2005 par Matt Birch repose sur deux mouvements puissants sur des micro-réglettes, suivis d’une section plus engageante sur une écaille parfaite.

Mettre les doigts dans « The Swarm » était un rêve ! Après avoir regardé toutes les vidéos existantes, découvrir ce bloc massif en plein milieu de nulle part était à la fois excitant et intimidant.

© Clément Lechaptois

Après le vent, c’est la neige qui s’est invitée dans le voyage, rendant l’accès au bloc difficile. Entre sessions de déneigement et conditions précaires, Nina a dû s’adapter pour trouver le bon timing.

« The Swarm », réputé pour être aussi esthétique qu’exigeant, a mis sa patience et sa peau à rude épreuve. Mais comme souvent dans ces trips, tout se joue jusqu’à la dernière minute : et c’est précisément lors du tout dernier jour qu’elle parvient à l’enchaîner, concluant son séjour sur une note parfaite :

Après mon enchaînement de « Direct North », il y a eu une tempête de neige a Bishop (eh oui, on a vraiment eu toutes les météos ahah) ce qui a repoussé les séances suivantes. J’ai donc commencé à essayer « The Swarm » assez tard dans le trip. On s’est mis de vraies missions pour atteindre le bloc avec de la neige jusqu’aux genoux !

La première séance a surtout servi à déneiger, mais le bloc restait trempé, avec seulement quelques prises sèches puisque la neige dégoulinait du sommet sous le soleil. Lors des sessions suivantes, j’ai rapidement trouvé mes méthodes, mais j’ai un peu sous-estimé la réputation du bloc… et le fameux « facteur peau » m’a vite rattrapée. Je me suis ouvert le doigt, ce qui m’a forcée à attendre le dernier jour pour réessayer. J’avais la pression, mais ça a marché au premier essai ce jour-là : « Last day best day ! ». C’était une journée parfaite 🙂

© Clément Lechaptois

Un cap mental et physique franchi

Ces ascensions marquent une progression impressionnante dans le parcours de Nina. Depuis son retrait des compétitions en 2021, elle enchaîne les croix majeures : « Versace » 8B, « Great Shark Hunt » 8A+, « Pura Vida » 8A+ ou encore « Jack’s Broken Heart » 8A+.

Mais ressent-elle un déclic dans son niveau ?

Ça ne fait pas très longtemps que je grimpe régulièrement dehors et que je m’investis vraiment dans cette discipline. Du coup, j’ai l’impression d’avoir progressé assez naturellement, en essayant des blocs de plus en plus durs. Petit à petit, j’ai été moins impressionnée par certaines lignes que je pensais trop dures. Je ne sais pas si on peut parler de « déclic », ou si c’est juste le résultat d’un processus logique, où j’ai testé les choses dans un ordre progressif et où j’ai pris confiance en moi bloc après bloc.

© Coll. Nina Arthaud

Côté mental, elle avoue avoir aussi énormément progressé :

Je voulais vraiment progresser sur l’aspect mental, mais jusqu’ici, je n’avais jamais pris le temps de le travailler autant que l’aspect physique et l’entraînement. Ces derniers mois, j’ai lu des livres, regardé des vidéos et surtout, j’ai essayé d’expérimenter par moi-même, en gardant ce qui marchait le mieux pour moi. Et j’ai l’impression que ça a plutôt bien marché !

 Une grimpeuse discrète, entre études et passion

En dehors de la grimpe, Nina mène une vie bien remplie, entre ses études et son travail :

Je suis étudiante en Master de psychologie et aussi ouvreuse dans une salle d’escalade à Genève, donc mes semaines sont bien remplies entre les cours, le travail et l’escalade.

En général, je passe la journée à bosser sur mes cours, puis je file grimper le soir pour retrouver mes potes à la salle. Le week-end, je vais grimper dehors si la météo est bonne. J’essaie de rester bien organisée pour que chaque aspect de ma vie ait sa place, sans que l’un empiète trop sur l’autre. C’est cet équilibre qui me permet de progresser tout en gardant du plaisir dans ce que je fais.

© Coll. Nina Arthaud

Et après ?

Après une aventure aussi marquante que ce voyage à Bishop, difficile de ne pas déjà penser aux prochaines destinations. Nina garde en tête plusieurs projets à venir, avec des blocs qui l’attendent en Suisse, en Italie et en France :

Pour les prochains mois, j’ai prévu de grimper près de chez moi, dans les Alpes françaises, en Suisse et en Italie. Je suis motivée pour découvrir ou redécouvrir des lignes iconiques de ces régions que ce soit en bloc ou en voie.

Et pour conclure, un dernier mot de Nina :

Je suis super contente d’avoir eu la chance de grimper en Californie. Un grand merci à mes sponsors en particulier l’équipe Karma8a avec qui j’ai fait ce trip. Merci aussi à Organic Climbing, Le grand massif et NatureClimbing pour le soutien qu’ils m’apportent dans ces projets.


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Publié le : 30 mars 2025 par Nicolas Mattuzzi

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