Trois grandes voies sur El Cap enchaînées en moins de 24 heures !

En réalisant l’ascension de trois des voies les plus mythiques d’El Capitan en moins de 24 heures, Jordan Cannon et Michael Vaill ont signé l’un des enchaînements les plus impressionnants de la saison. Un hommage à l’exploit d’Alex Honnold et Sean Leary, mais aussi l’aboutissement de près de dix ans d’une quête personnelle pour Cannon.
Gravir El Capitan une fois dans sa vie est un rêve pour beaucoup. L’enchaîner trois fois dans la même journée, sur trois grandes voies aussi mythiques que techniques, relève de la légende. C’est pourtant ce que viennent de réaliser les grimpeurs américains Jordan Cannon et Michael Vaill, en signant l’ascension express du « El Cap Triple » en 23 heures et 19 minutes. Un exploit de fond, de forme, et de stratégie, qui les inscrit dans la lignée des plus grands noms du Yosemite.

© Samuel Crossley
Leur objectif ? Répéter l’exploit devenu mythique d’Alex Honnold et Sean Leary en 2010 : enchaîner dans la même journée « The Salathé Wall », « Lurking Fear », et « The Nose », trois grandes voies qui parcourent le versant sud-ouest d’El Capitan, au cœur du Yosemite. En tout, plus de 80 longueurs, près de 2 500 mètres d’escalade, avec des sections allant jusqu’au 8b+.
Un rêve forgé au fil des années
L’idée de cet enchaînement titanesque ne date pas d’hier pour Jordan Cannon. Il y a neuf ans, alors qu’il redescendait épuisé de sa toute première voie sur El Cap, il faisait la rencontre du regretté Brad Gobright, qui venait tout juste de réaliser cet enchaînement avec Scott Bennett. Une rencontre déterminante : « Le El Cap Triple est devenu l’objectif le plus fou que je pouvais imaginer à Yosemite », raconte Cannon.

© Coll. Cannon
Depuis, il a multiplié les projets et les préparations : le Double (El Cap + Half Dome en 2017), le Triple Crown (El Cap, Half Dome et Mount Watkins en 2021), puis l’El Cap Double (The Nose + Salathé Wall en 2024). Mais l’ultime objectif restait hors de portée… jusqu’à sa rencontre avec Michael Vaill, alias « Fast Mike », connu pour ses records de vitesse sur les enchaînements les plus extrêmes du parc.
Une stratégie millimétrée
Le 2 juin à 20h00, les deux grimpeurs se lancent dans leur aventure, débutant par « Salathé Wall », qu’ils graviront en 6h47. Un temps record, malgré une chute de Cannon dans une section d’artif du Headwall, en pleine nuit. Leur tactique ? Une alternance entre le short-fixing (permettant au second de remonter sur corde rapidement) et de courtes sections de grimpe en simultané, afin d’économiser temps… et orteils. « Moins tu passes de temps dans tes chaussons d’escalade, mieux c’est », assure Cannon, qui a géré les passages en libre tandis que Vaill, expert en artif rapide, assurait les longueurs techniques sur coinceurs.

© Connor Brown
Après un premier rappel et un court moment de panique — leur ravitaillement n’étant pas au rendez-vous — ils s’élancent sur « Lurking Fear », qu’ils avalent en 4h41, leur meilleure performance sur cette grande voie !
Ne reste plus que « The Nose », la voie la plus emblématique… et la plus exposée au soleil. En pleine chaleur de midi, les deux grimpeurs lèvent un peu le pied, décidant de savourer les derniers efforts de cette journée hors norme. Ils atteignent le sommet d’El Cap pour la troisième fois de la journée à 19h19, 23 heures et 19 minutes après leur départ.
Un hommage et un passage de relais
En choisissant de répéter les trois mêmes voies qu’Honnold et Leary dans le même ordre et au même horaire, Cannon et Vaill assument pleinement leur hommage aux pionniers du genre. Mais ils y ajoutent une touche personnelle : plus de sections libérées, plus de fluidité dans la grimpe, et une réflexion stratégique fondée sur des années d’expériences au Yosemite.
Sur Instagram, Cannon a partagé l’histoire de ce projet qui a guidé ses ambitions depuis près d’une décennie, citant une phrase écrite par Honnold lors d’une rencontre en 2016 : « Go big! ». Deux mots devenus un mantra, incarnés dans ce rêve enfin réalisé. « C’est difficile d’imaginer aller encore plus loin que ça », conclut-il.

© Coll. Cannon
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