Les Belges Seb Berthe et Siebe Vanhee enchaînent un projet extrême en grande voie !
Les grimpeurs Belges Seb Berthe et Siebe Vanhee ont réalisé la première ascension en libre d’un projet extrême : « Histoire sans Fin », une grande voie cotée 8b+, qu’ils décrivent comme « la plus belle grande voie granitique de ce niveau en Europe ».
« Histoire sans Fin » porte bien son nom. Cette grande voie, située sur Les Clochers du Portalet, un sommet suisse culminant à 2 985 mètres d’altitude, a commencé à être ouverte il y a plus d’une vingtaine d’années. Elle vient tout juste d’être libérée pour la première fois par les grimpeurs Belges Seb Berthe et Siebe Vanhee.
Cette grande voie de 200 mètres, décomposée en 11 longueurs, aura d’abord été libérée par Seb, qui enchaînera la voie de façon presque imprévue, sortant au sommet à la tombée de la nuit.
Siebe, qui n’avait pas réussi à enchaîner la voie en même temps que Seb, reviendra trois jours plus tard avec lui et réalisera à son tour la voie, signant la seconde ascension en libre.
Voici le commentaire de Siebe :
La semaine dernière, Seb Berthe et moi avons eu une chance incroyable de réaliser les deux premières ascensions en libre de ce que nous considérons comme la plus belle grande voie granitique de ce niveau en Europe. C’est peut-être même la seule dans ce niveau. Cela fait un an que j’ai entendu des rumeurs sur une nouvelle ligne, incroyablement propre et dure, sur le Petit Clocher du Portalet en Suisse près de Martigny.
En 2001, Didier Berthod et François Mathey ont ouvert la célèbre deuxième longueur, une fissure de 45 mètres en 7c+, entièrement en trad: l’une des plus belles longueurs ! Cette fissure se termine sur un beau pilier, au milieu de nulle part. Le granite lisse situé au-dessus a dû attendre près de 20 ans avant que Fabien Borter et Bertrand Martenet imaginent une incroyable suite (celle-ci est équipée), qui suit des dalles et des arêtes jusqu’au sommet. Malgré leur lecture visionnaire, c’est en 2020 que cette grande voie a pu être finie d’être équipée avec l’aide de Didier Berthod pour trouver la longueur manquante, une belle arête orange cotée 8b.
À la fin du mois de juin, avec Jean-Elie Lugon, nous avons trouvé un petit créneau pour aller essayer « Histoire sans Fin ». Je me suis fait botter le cul et j’étais dans un état physique lamentable ! Malgré ça, je me suis dit que c’était une des plus belles lignes que je n’avais jamais essayées. La semaine dernière, je suis revenu avec Seb, physiquement en meilleure forme mais toujours intimidé par la ligne. J’y suis plutôt allé en mode repérage pour voir ce que ça allait donner. Mais avec les encouragements de Seb sur la paroi, j’ai rapidement changé d’état d’esprit. Nous avons tous les deux travaillé la longueur clé jusqu’à ce que Seb l’enchaîne. Je sentais que j’avais besoin de quelques essais supplémentaires pour l’enchaîner aussi, mais Seb n’avait plus de temps. On a donc continué l’ascension, ça a été un gros combat physique et mental pour lui, nous avons terminé à la nuit ! Ce jour-là, Seb a ainsi fait la première ascension en libre. Comme toujours, il a été super fort et a essayé chaque longueur jusqu’à les réussir. »
Trois jours plus tard, c’était à mon tour, je suis revenu avec le soutien de Seb et Soline. Cette fois-ci, j’étais convaincu que je pouvais enchaîner cette ligne. Je me suis lancé dans la fissure en 7c+, puis dans la traversée en 7c jusqu’à arriver au crux. Je me suis alors soudainement retrouvé au milieu de la longueur en 8b+, au niveau du crux, qui est un pas de bloc super technique. Il faut appuyer avec la bonne pression sur des prises de pied microscopique, qui permettent de rendre des mouvements qui semblent impossibles, possibles. Tout est dans la tête, il faut oser et pousser sur les pieds. J’ai réussi à enchaîner cette longueur au premier essai ce jour-là.
Il y a également une longueur en 8b, une arête en dalle difficile, qui a été un bon combat mental. C’était effrayant mais magique ! Ça m’a semblé tellement impossible au premier essai, mais quand tu doses bien la pression sur les pieds et que tu gères correctement l’équilibre, la magie opère. Encore une fois, j’ai enchaîné du premier coup ! La dernière longueur dure est une dalle corsée en 8a+. J’ai réussi à bien grimper mais j’étais nerveux d’imaginer tomber dans cette dernière section difficile… et c’est ce qui s’est passé, je suis tombé. Merci grâce à Seb et Soline, j’ai relativisé ma chute, j’y suis retourné et j’ai atteint le haut de la voie !
C’est un honneur, vraiment ! Un honneur de pouvoir grimper sur un mur aussi beau, une voie aussi magique, avec le soutien et l’enthousiasme de Jean-Eli, Seb et Soline. Nous sommes tous impressionnés par l’ouverture d’esprit et la gentillesse des locaux. Nous avons eu le plaisir de rencontrer Didier Berthod et François Mathey, ainsi que beaucoup d’autres, dans l’accueillante Cabane d’Orny, hébergée par Yanik et son équipe. C’est génial de voir comment la communauté des grimpeurs vit dans cette cabane de montagne. Merci à vous tous pour les bonnes ondes. »
Et le commentaire de Seb :
La différence entre l’ascension en libre de Siebe et la mienne est assez amusante à noter : en enchaînant toutes les longueurs les unes après les autres, Siebe était vraiment sur un rythme de croisière impressionnant, il ne laissait aucune chances à la voie et gérait tous les paramètres.
Au contraire, moi, j’étais en mode freestyle total, tombant dans chaque longueur et tapant essais après essais jusqu’à ce que ça finisse par marcher, ne sachant rien de la longueur suivante, mais croyant fermement que j’avais la capacité de la faire. C’était une vraie journée de montagnes russes ! J’aime ce style car il m’apporte les meilleures sensations jamais ressenties en escalade ! »
« Histoire sans Fin » c’est :
– Deux longueurs « d’approche » en 6b+
– L1 d’État de Choc – 6b+
– L2 en dièdre, puis en fissure – 7c+
– L3 jusqu’à l’arête – 7c
– L4, le crux en 8b+
– L5 – 7b+
– L6 « magique » – 8b
– L7 en dalle – 8a+
– L8 pour rejoindre État de choc – 6b+
– Une sortie facile jusqu’au sommet