Feuille blanche, nouvelle approche : Paul Jenft est prêt pour le Championnat de France !

À l’aube du Championnat de France de bloc 2025, Paul Jenft, l’un des grands favoris au titre national, se confie sur sa préparation et ses ambitions dans cette interview exclusive !
Chaque début de saison marque le retour d’un rendez-vous incontournable pour les grimpeurs français : le Championnat de France de bloc. Plus qu’un simple titre national, cette compétition est un premier test grandeur nature pour les athlètes avant les échéances internationales. L’enjeu est de taille : s’imposer face aux meilleurs bloqueurs du pays et inscrire son nom au palmarès d’un championnat qui, année après année, est de plus en plus relevé.
Parmi les favoris de cette édition 2025, un athlète attire particulièrement l’attention : Paul Jenft. Déjà sacré champion de France en 2022 et vice-champion en 2023, il fait partie de ceux qui comptent dans le paysage du bloc tricolore. Son expérience sur le circuit international, sa capacité à performer sous pression et son engagement total dans l’entraînement font de lui un sérieux prétendant au titre. Mais dans une discipline où chaque détail compte et où la moindre erreur peut coûter cher, rien n’est jamais joué d’avance.
Comment aborde-t-il ce nouveau Championnat de France ? Quelle place occupe-t-il dans son programme, entre préparation hivernale et objectifs internationaux ? Comment son expérience des Jeux Olympiques a-t-elle influencé son approche de la compétition ? Autant de questions auxquelles il répond sans détour, partageant son état d’esprit, sa vision du haut niveau et les défis qu’il s’apprête à relever.
Entretien avec Paul Jenft, qui a complètement bouleversé sa façon de s’entraîner cette saison !
Sur le Championnat de France de bloc 2025
Tu as déjà été Champion de France en 2022 et vice-champion en 2023. Comment abordes-tu cette nouvelle édition en tant que sérieux prétendant au titre ?
Figurez-vous que justement, je l’aborde comme si je n’étais pas prétendant au titre ! C’est la première compétition d’une nouvelle saison, je ne connais pas l’état de forme des autres et j’ai même du mal à estimer le mien… Je pars donc du principe qu’une bonne performance n’est pas acquise.
De manière générale, je considère toujours que rien n’est acquis avant chaque compétition. Je préfère me concentrer sur ce que j’ai à mettre en place pour perfer.

© Aurèle Bremond
Qu’est-ce que représente pour toi le Championnat de France par rapport à tes objectifs internationaux ? As-tu une approche différente pour cette compétition ?
Habituellement, je considère le Championnat de France comme aussi important qu’une étape de Coupe du Monde. Mais cette année, j’ai recommencé l’entraînement un peu plus tard que d’habitude, donc je n’en ai pas fait une priorité du point de vue de ma préparation physique. Je vise plutôt les Coupes du Monde comme vrai pic de forme.
Mais je suis super motivé ! J’ai vraiment envie de faire une bonne place sur cette compétition. Alors, peu importe mon niveau physique, soyez-sûr que mon engagement sera total !
Comment juges-tu le niveau actuel des grimpeurs français en bloc, et qui vois-tu comme tes principaux concurrents pour ce titre 2025 ?
Je pense qu’il y a un très bon niveau en France. D’ailleurs, on est deuxième du classement mondial des nations en bloc. Il y a surtout une grosse densité avec un faible écart de niveau entre le premier et le 15ᵉ Français ; la compétition est donc très ouverte.
C’est aussi compliqué de me projeter sur le niveau des autres, car je n’ai pas participé à une seule compétition nationale depuis les derniers Championnats de France…
En tout cas, j’aimerais bien pouvoir me tirer la bourre avec Mejdi [Schalck]. Il est en forme en ce moment, et ça me ferait plaisir de pouvoir rivaliser !

© IFSC
Sur son entraînement hivernal
Ton calendrier a été bien rempli en 2024 avec les JO et les Coupes du Monde. Comment as-tu géré ta préparation hivernale cette année pour arriver en forme sur cette nouvelle saison ?
Après la saison 2024, j’ai pris une bonne pause. C’était la fin du cycle olympique et je ressentais le besoin de prendre le temps de débriefer ce que j’avais vécu avant de me relancer sur un cycle de plusieurs années. J’ai continué à grimper parce que j’étais encore super motivé, mais je ne voulais pas recommencer l’entraînement tant que mon projet sportif n’était pas parfaitement ficelé.
Tout ça m’a pris un peu de temps, et je n’ai recommencé l’entraînement que début décembre. Ça fait un entraînement hivernal assez raccourci ! Je ne m’attends donc pas à des gains très importants pour ce début d’année, il reste encore beaucoup de boulot ! Malgré tout, je suis vraiment satisfait de ce que j’ai déjà mis en place cet hiver. J’ai la sensation que tout est là pour que je progresse. C’était mon objectif principal pour ce début d’année.

© Hugo Wirth
As-tu intégré des nouveautés ou des changements spécifiques dans ton entraînement cet hiver ? Plus de volume, un travail mental particulier ou de nouvelles méthodes ?
Comme je le disais, j’ai fait de grands changements cette année. En réfléchissant profondément à ma manière de m’entraîner, je me suis rendu compte que j’avais un fonctionnement déjà assez optimisé, qui marchait très bien. Mais j’ai aussi compris que les marges de progression étaient limitées… J’ai eu l’impression d’approcher un plateau et j’ai eu la sensation de devoir me renouveler pour continuer à progresser rapidement. Le moment m’a donc semblé opportun pour initier un changement profond dans mon fonctionnement.
J’ai eu envie de repartir d’une feuille blanche en termes d’entraînement. J’ai gardé ce qui était fondamental pour moi et j’ai changé tout le reste ! J’ai toujours été autonome ces dernières années, je travaillais uniquement avec un préparateur physique et je n’avais pas d’entraîneur (sauf en 2023, où j’ai travaillé avec Romain Desgranges en difficulté pour préparer les J.O).
Cette année, j’ai délégué une partie de mon entraînement à deux personnes : Victor Larzul en tant qu’entraîneur et Mathieu Carpentier en tant que préparateur physique. Même si je m’implique dans la planification, je suis un peu moins acteur qu’avant.
Maintenant, j’ai un regard beaucoup plus critique, je suis capable de remarquer si je vais dans la mauvaise direction, si je ne respecte pas mon corps ou si je ne m’entraîne pas assez. J’ai aussi une compréhension plus fine de la manière dont je m’entraîne. Je fais donc plus facilement confiance à Victor et Mathieu, et j’arrive à croire et à m’impliquer dans ce qu’ils me proposent.
Pour les deux années à venir, mon but est de progresser significativement en force pour tenter de combler une partie de mon retard sur les autres compétiteurs. Pour y arriver, j’ai augmenté l’intensité globale de mes entraînements et j’ai diminué en quantité. Je fais un peu plus de préparation physique et beaucoup plus de blocs que de difficulté. J’ai aussi raccourci un peu le temps de mes séances. J’expérimente également le fait de prendre un jour de repos tous les deux jours d’entraînement. Ça me permet de garder beaucoup plus de fraîcheur sur mes séances et de ne pas accumuler trop de fatigue sur les cycles d’entraînement.

© Hugo Wirth
À quoi ressemble une semaine type pour toi en ce moment, entre entraînement, récupération et vie personnelle ?
Cette année, j’ai un peu moins de cours (je suis en formation d’ingénieur à Grenoble INP/Polytech) car je termine seulement les matières que j’avais mises de côté pour les J.O. J’ai 14 heures de cours par semaine : 2h le lundi, 6h le mardi, 3h le mercredi et 3h le jeudi. Quand j’ai une demi-journée de cours, je fais une seule grosse séance d’entraînement. Quand je n’ai pas cours de la journée, je fais deux séances plus courtes, souvent 2h de préparation physique puis 2h ou 3h de grimpe. Et quand je finis tard les cours, je fais une séance libre le soir.
Quand je ne grimpe pas, j’essaie de faire 1h de vélo. Globalement, je m’entraîne autour de 20h que j’étale sur cinq jours par semaine. J’essaie de prendre un jour par semaine où je ne fais pas du tout de sport. Ça me permet de ne pas accumuler trop de fatigue et donc de toujours maintenir de l’intensité sur mes séances.
Sur son expérience olympique et « l’après J.O »
2024 a été une année particulièrement forte pour toi avec ta qualification et ta participation aux J.O. Avec du recul, qu’est-ce que tu retiens de cette expérience ?
Participer aux J.O a été une expérience incroyable, tant sur le plan personnel que sportif, mais ce qui m’a le plus marqué, c’est une prise de conscience bien plus large. Avant, je ne mesurais pas vraiment l’importance du sport dans notre société. C’est en regardant les épreuves, en échangeant avec le public, mes proches et d’autres athlètes que j’ai réalisé à quel point le sport est essentiel pour chacun. Il permet aux gens de se sentir mieux, d’être en bonne santé et il enseigne aux enfants des valeurs comme l’équité et une concurrence saine.
Grâce aux J.O, je me suis rendu compte que le haut niveau était le meilleur ambassadeur de cette cause que je trouve essentielle. Je suis super heureux de pouvoir apporter ma petite pierre à l’édifice. Pour moi, il est essentiel de trouver du sens dans ce que je fais pour pouvoir m’investir pleinement. Et cet été, j’ai trouvé une partie de la réponse à cette question qui me trotte souvent dans la tête…

© IFSC
Te qualifier pour la finale olympique et terminer 8ème, c’est incroyable. Qu’as-tu ressenti à ce moment-là, sur le mur et en dehors ?
C’était d’ailleurs assez inespéré ! À chaque fois que j’ai fait de bonnes perfs en combiné, c’était le même scénario : je sortais dans les trois premiers du tour de bloc et je rentrais 8ème de la finale après un résultat moyen en diff.
Quand j’ai terminé mon tour de bloc assez loin des premiers, je me suis dit que je n’avais plus d’espoir de rentrer en finale. Je devais terminer dans les cinq premiers en battant des grimpeurs que je n’avais jamais battus. Ça semblait mission impossible…
Mais avec ce mauvais tour de bloc, j’ai aussi oublié toute la pression que je m’étais mise et j’ai grimpé totalement relâché en diff. J’ai réalisé l’un de mes meilleurs runs depuis que je fais des compétitions. Quand je suis descendu, le public m’a directement fait comprendre que j’avais fait une bonne opération. Quelques grimpeurs sont passés, puis j’ai rapidement su que j’étais en finale. À ce moment-là, j’en ai juste profité, je n’avais pas grand-chose dans la tête. J’avais juste un sentiment d’accomplissement énorme !

© IFSC
L’après J.O peut parfois être difficile pour certains athlètes. Comment as-tu vécu cette période, à la fois physiquement et émotionnellement ?
Je comprends que ça puisse être très compliqué et je pense qu’il y a deux raisons principales à cela. La première peut venir du fait d’avoir subi un échec aux Jeux après énormément de préparation, ce qui n’est absolument pas mon cas. La seconde peut venir du fait de perdre l’objectif principal de sa vie du jour au lendemain. Donc ne plus avoir de quoi remplir ses journées et ne plus avoir de motivation pour avancer dans la vie…
Personnellement, je n’ai été dans aucun des deux cas puisque j’étais encore vraiment motivé par l’escalade après les Jeux. J’ai passé le reste de l’été à grimper. J’avais envie de grimper dehors, faire de belles lignes (pas forcément dures), je voulais juste apprécier l’escalade simplement. J’ai adoré cette période parce que j’avais la sensation du travail accompli et d’avoir mérité du repos.
En revanche, ça n’a pas été si facile de reconstruire mon projet sportif en novembre. Il a fallu retrouver la motivation de faire des compétitions, alors que je savais que je ne revivrais sûrement pas une expérience comme les Jeux avant très longtemps.
Je crois que c’est l’envie de m’entraîner qui m’a redonné l’envie de faire de la compèt. À partir du moment où j’ai décidé que j’allais tout changer, la curiosité de découvrir quelque chose de nouveau m’a redonné l’envie de retourner à l’entraînement. Tout est revenu naturellement comme avant et j’ai maintenant retrouvé la passion de la compétition !

© Sam Pratt
As-tu remarqué des changements dans ton approche ou ta manière de grimper depuis les JO ? Ou dans la manière dont les gens te perçoivent en tant qu’athlète ?
Dans la manière de grimper, pas du tout. Mais c’est vrai que ça a changé le regard que les gens ont sur moi. Surtout pour ceux qui ne regardaient pas l’escalade. Les J.O, c’est une compétition beaucoup plus populaire que les autres, donc forcément le public est plus large et la visibilité est plus importante. En plus de ça, je trouve qu’il y a eu un engouement spécial de la part des Français pour ces Jeux. Je croise régulièrement des gens dans les salles qui me disent qu’ils m’ont vu aux J.O, alors qu’avant, peu de gens me reconnaissaient.
Je fais aussi de la compétition pour faire plaisir aux gens qui aiment le sport et qui aiment regarder l’escalade. Moi-même, je suis fan de plein de sports. Donc forcément, ça me touche que les gens s’intéressent à ce que je fais et soient contents de me regarder grimper ; ça donne du sens au fait de faire des compétitions. Mais j’avoue que, des fois, j’aimerais bien être tranquille, faire les choses dans mon coin, sans attirer l’attention de personne. Mais je ne vais pas me plaindre, je suis un des compétiteurs qui attire le moins l’attention !

© IFSC
Est-ce que cette expérience olympique a changé ton regard sur tes objectifs futurs ? Y a-t-il encore des rêves ou des défis que tu aimerais accomplir ?
Pas tellement, je vois les Jeux comme une case cochée parmi des centaines, pas du tout comme un aboutissement en soi. J’ai encore plein d’objectifs en compétition ou en falaise. Je n’ai jamais gagné de Coupe du Monde, je n’ai jamais fait de podium aux Championnats du Monde, je n’ai pas fait de voie plus dure que 9a… Je n’ai pas encore fait la moitié de tout ce que j’aimerais faire en escalade !
Et puis, je ne pense pas avoir besoin d’objectifs toujours plus grands pour continuer à m’amuser en escalade. Il y a sûrement un jour où je vais arrêter de progresser. Je prendrais toujours du plaisir à dépenser mon énergie pour grimper les voies les plus dures possibles, sans forcément être au top.

© Sam Pratt
Sur sa saison 2025 et ses objectifs
Quels sont tes grands objectifs pour la saison 2025 ?
Alors, chronologiquement :
- M’approprier mon entraînement et l’optimiser au maximum.
- Ne pas accumuler trop de fatigue pour garder un maximum d’intensité sur chaque séance.
- Progresser physiquement sur les quelques points que j’ai identifiés.
- Retrouver mon niveau technique et tactique de 2024 sur les Coupes du Monde, en bloc et en diff.
- Me sélectionner pour les Championnats du Monde de bloc et de diff.
- Arriver aux Championnats du Monde en forme et être capable de montrer mon meilleur niveau technique et tactique.
Les qualifications pour les JO 2028 semblent déjà dans toutes les têtes. Est-ce déjà un objectif pour toi ou préfères-tu te concentrer sur la saison en cours ?
Comme tout le monde, ça fait partie des petits rêves qui trottent au fond de ma tête. Mais le plus important pour moi à l’heure actuelle, c’est d’augmenter mon niveau. On ne connaît même pas encore le format. Alors que je dise que je veux y aller ou non, ça ne changera rien aux deux saisons à venir.

© Sam Pratt
Tu as montré que tu pouvais performer aussi bien en bloc qu’en difficulté, mais si tu devais choisir une discipline, laquelle te correspondrait le mieux et pourquoi ?
En considérant l’aspect uniquement physiologique, je dirais que la difficulté me correspond mieux. J’ai un profil plutôt endurant et je progresse plus facilement en rési qu’en force. Mais pour l’instant, je n’ai ni la nécessité ni l’envie de faire un choix. Actuellement, je m’entraîne plus en bloc dans le but de progresser physiquement, mais je fais ce travail autant pour la diff que pour le bloc.
Une touche plus personnelle
Quelle est la leçon ou le moment le plus marquant que tu retiens de ton parcours jusqu’à maintenant ?
Il y a eu plein de moments marquants, mais celui que je me rappelle le plus souvent, c’est quand j’ai topé le bloc 2 de la demi-finale de l’OQS de Shanghai. J’avais fait un premier run où j’avais shunté un mouvement et j’avais validé la zone avec la mauvaise main. Le juge avait sûrement mal regardé et j’ai vu sur le tableau des résultats que je n’avais pas la zone. Sur le coup, ça m’a vraiment énervé, je n’arrivais plus à me concentrer et je n’arrivais plus à refaire le mouvement… On était tous hypertendus parce qu’on jouait notre sélection pour les J.O sur ce tour. Si je passais à côté, c’était retour à la case départ, et il allait falloir attendre quatre ans pour que je retente ma chance ! Mais j’ai eu un moment de lucidité 30 secondes avant la fin du temps, comme un instinct qui m’a remis sur le bon chemin. Je me suis repris en main, j’ai mis le run de la dernière chance et j’ai topé le bloc totalement à l’agonie !
J’ai repensé à ce bloc plus tard et je me suis rendu compte que c’était le bloc qui m’avait permis d’aller aux J.O. J’ai marqué 25 points sur ce top, ce qui m’a fait passer en finale pour quelques points. C’est comme ça que j’ai pu faire 4ème et donc que je me suis sélectionné aux Jeux un mois plus tard… Je trouve ça complètement dingue, ma carrière a pris un tournant sur un essai désespéré ! C’est une vraie satisfaction d’avoir réussi à changer la donne sur une situation aussi critique.

© IFSC
Quand tu ne grimpes pas, qu’est-ce qui occupe tes pensées ou ton temps libre ? Un hobby secret peut-être ?
À part les cours, je fais un peu de vélo de route quand j’ai le temps. J’étais dans un club de cyclisme avant de faire de l’escalade et j’ai toujours continué à rouler une à deux heures par semaine. J’aime bien les efforts d’endurance, ça me change de mes entraînements. Sinon je fais aussi du ski de rando quand il y a de la neige.
Pour toi, quelle est la plus grande qualité qu’un compétiteur en escalade doit avoir ? Et quelle est la tienne ?
Pour faire la différence, je pense que le plus important, c’est d’être bon tactiquement, surtout en bloc où le format de compétition est assez complexe à gérer. Il faut savoir mettre ses essais au bon moment, gérer entre apprentissage du mouvement et récupération, bien choisir les méthodes et les adapter quand il le faut. Tout ça dans un contexte assez stressant.
Je dirais que mon point fort est de savoir bien utiliser ma taille. J’ai une bonne estime de ce que je suis capable de faire, donc ça me permet de trouver rapidement des solutions dans les blocs.
Si tu pouvais donner un conseil au « toi » qui débutait la compétition il y a quelques années, ce serait quoi ?
« Ne te précipite jamais ! ». C’est un conseil qui me vient de mes parents et qui a été déterminant.
Je suis convaincu que le fait d’arriver au très haut niveau ne dépend pas vraiment des bons choix que tu fais, mais plutôt des mauvais choix que tu ne fais pas. Depuis que je fais de l’escalade en compétition, j’ai pris chaque décision en pensant au long terme. Alors, j’ai parfois progressé un peu moins vite que les autres, mais j’ai jusqu’ici évité la plupart des pièges tendus par le haut niveau. Par exemple, j’ai choisi de ne pas aller en sport-études au lycée. Je suis resté chez mes parents, assez loin de mon lieu d’entraînement. Je n’ai pas pu m’entraîner autant que certains grimpeurs, mais j’étais hyper investi et motivé à chaque séance, je ne me suis jamais blessé et j’ai toujours gardé le moral. C’est le genre de décision qui a eu un impact énorme, même si elle ne semblait pas optimale de prime abord.

© Hugo Wirth
Et un peu de fun pour clôturer cette interview
Tu peux inviter une personnalité (vivante ou non) à une session d’escalade. Qui inviterais-tu et pourquoi ?
Tadej Pogacar, pour montrer à tout le monde qu’il y a meilleur grimpeur que lui !
Quel est ton repas préféré après une grosse compétition ? Et quel est le truc le plus bizarre que tu aies mangé pour « te récompenser » ?
J’adore manger des bonnes choses et je n’ai pas besoin de mériter une récompense pour le faire ! Il y a une mode dans l’escalade où certains grimpeurs se vantent de manger peu pour maigrir et pour faire sérieux… Je trouve ça hyper malsain et je ne suis pas du tout là-dedans. Moi, je suis plutôt de la team « mieux vaut trop que pas assez » : je donne à mon corps ce dont il a besoin. Je fais bien assez de sport pour ne pas me prendre la tête avec mon poids.
Sinon, le truc le plus bizarre que j’ai fait, c’était après ma première finale en Coupe du Monde de bloc, j’ai mangé une pizza sans la couper, en la pliant en quatre !

© IFSC
Enfin, si tu devais choisir une chanson pour te motiver juste avant un run décisif, ce serait laquelle ?
Je ne mets jamais de musique juste avant de grimper en compétition. Je trouve que ça me déconcentre et ça me déconnecte de l’ambiance de la compétition. Je préfère être complètement immergé dans l’ambiance de la salle. Comme ça, dès que je commence à grimper, je ne perds pas de temps à m’adapter à l’environnement extérieur et je suis directement focus sur le bloc ou la voie (désolé c’est pas très fun !).
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