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Escalade et nutrition – Ce que mangent les champions de la grimpe

- Le 18 juillet 2020 -

Mathilde Becerra, Mickael et Bassa Mawem sont trois athlètes de haut niveau avec un point commun : l’importance accordée à leur alimentation. Ce mois-ci, ils ont accepté de nous en dire un peu plus sur leur rapport à la nourriture, et de nous permettre de découvrir quels mangeurs ils sont.

 Championne de France de difficulté 2016, Mathilde Becerra a récemment opéré un changement radical dans sa carrière. Un gros ras-le-bol de la pression du haut niveau, adieu les compétitions et bonjour la falaise, le retour aux origines de la grimpe.

Son credo, c’est « on est ce qu’on mange » et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’alimentation de Mathilde est à l’image de sa grimpe : le besoin de nature et de naturel prédomine.

Tenant à ce que ses repas soient « les plus sains possible, pour préserver et respecter [son] corps, tout en respectant l’environnement », elle est devenue végétarienne à tendance végane. La grimpeuse privilégie « les aliments de saison, bio et locaux, achetés en vrac pour limiter les déchets » et, comme on peut se l’imaginer, évite les aliments transformés. Petite mangeuse depuis l’enfance « mes parents devaient insister pour que je finisse mes assiettes! J’avais surtout envie d’aller dehors pour courir et grimper partout ! », elle a eu la chance de maintenir une relation sereine avec la nourriture y compris à l’adolescence « je ne faisais aucune fixation sur la nourriture, j’étais surtout motivée pour aller grimper ! ».

Depuis l’arrêt de la compétition, elle confie manger encore mieux qu’avant :« surtout des plats à base de fruits et légumes frais et d’aliments « naturels », des graines et céréales, des laits végétaux » accompagnés d’un petit dessert au chocolat ou autre gourmandise dans les moments de célébration, et bien sûr, ses followers sur Instagram s’en doutent car bien souvent on le retrouve en story : du muesli, beaucoup, passionnément, à la folie !

Mathilde Becerra en résumé :

  • Petits repas ou grosses assiettes ? petits repas
  • Sucré ou salé ? sucré
  • Tartines ou croissants ? tartine
  • Ton plat préféré ? j’en ai plein c’est impossible de choisir ! Curry au lait de coco, bouddha bowl, salade melon fêta, etc…
  • Ton aliment doudou ? un bon pain complet avec des graines
  • Ta potion magique ? jus de citron gingembre cannelle

Pour Mika Mawem, les enjeux de son alimentation sont centrés sur la performance et le maintien de son poids de forme. Qualifié pour les Jeux Olympiques, le spécialiste du bloc doit désormais s’entrainer aussi pour la difficulté et la vitesse. Avec le report des J.O., il va devoir gérer les entrainements dans les trois disciplines pendant une année de plus et réussir à arriver au sommet de sa forme en 2021.

Lui sa bataille, c’est son attrait depuis l’enfance pour les sodas et les sucreries. « Jusqu’à l’année précédent mon entrée en équipe de France, dans la journée je buvais 9/10e de soda et 1/10e d’eau » précise-t-il avant d’ajouter « toutes les cochonneries que j’ai adorées étant ado, c’est une vraie dépendance. »

A présent, son alimentation est devenue sa priorité pour pouvoir continuer à s’entrainer de manière aussi intensive. « J’ai vraiment envie de pouvoir ne pas compter, manger un Kinder Bueno quand j’ai envie, ou bien remplacer mes flocons d’avoine par des céréales Lion. Tous ces petits aliments sucrés, c’est difficile mais j’essaie de les amener au bon moment dans la journée, quand je sais que je vais les dépenser. Sans une bonne alimentation, j’aurais arrêté la compétition depuis bien longtemps. Ca m’évite pas mal de choses, notamment les blessures, et puis ça me permet de gérer mon poids, l’énergie pendant les séances, la récupération, c’est vraiment très très important. »

Le maintien de son poids de forme représente pour lui un véritable enjeu « lobjectif, cest de mentrainer au même poids toute lannée », ce qui nécessite de veiller à ne pas prendre de gras ni de muscle et de ne pas en perdre non plus.

Avec le confinement, impossible pour lui de conserver les mêmes charges d’entrainement. Il lui a fallu se réadapter autant sur le plan du rythme que de la composition de ses repas et en a profité pour modifier un peu ses apports. Lui qui avait quasiment supprimé les féculents jusqu’à il y a trois ou quatre ans pour éviter de prendre du poids, a pris conscience de la composante psychologique de ce phénomène, « Tu te dis que cet aliment va te faire grossir et ton corps réagit dans ce sens-là. Alors que quand tu arrives à te relâcher -ça ne veut pas dire avoir une mauvaise alimentation- ça va et ça change». De fait, il a progressivement réintroduit les féculents dans son alimentation et en consomme désormais sans sourciller chaque matin lors de son petit-déjeuner-repas.

En effet, l’organisation de sa journée est telle que le grimpeur n’a pas la possibilité de déjeuner à midi, il doit se contenter d’un en-cas sucré pour reprendre de l’énergie et de compléter en cas de besoin avec des graines oléagineuses, capables de le rassasier en un minimum de volume.

© Digital Climbing

En prévision de la quantité d’énergie que vont lui demander ses exercices, il veille donc à consommer un véritable repas le matin, composé en général « des restes de la veille, de sandwiches avec des oeufs et de flocons d’avoine ».

En fin de séance, c’est sucres rapides obligatoires pour refaire les réserves musculaires et un petit repas si possible « dans les 45 minutes. Sinon j’ai toujours mon shaker pas très loin, avec différentes poudres naturelles qui contiennent toutes les vitamines nécessaires, les protéines qui s’assimilent bien, etc. Le soir pour le diner, c’est des légumes et si j’ai une grosse faim, je vais rajouter des protéines. Et un petit dessert pas trop énorme. Un. petit. dessert. »

Le « bon » dessert, c’est la récompense après une période daffûtage : il le réserve aux veilles de compétition. Et pas de relâche en pleine saison car la récupération est aussi importante que l’entrainement et pour Mickael Mawem, l’alimentation en fait intégralement partie.

Partenaire d’une marque de compléments alimentaires à base de phycocyanine[1], le champion explique qu’il en consomme lui-même pour maintenir sa concentration sur des périodes de trois à quatre heures de suite et améliorer sa récupération par une meilleure oxygénation du sang. Pour lui, l’usage est d’abord pratique, un gain de temps sur sa journée, et par ailleurs, pour obtenir les mêmes doses de micro-nutriments il lui faudrait consommer des quantités d’aliments et de boissons incompatibles avec ses besoins caloriques[2].

Mickael Mawem en résumé :

  • Petits repas ou grosses assiettes ? Grosses assiettes
  • Sucré ou salé ? Salé parce que on arrive à l’éliminer plus facilement
  • Tartines ou croissants ? Tartines
  • Ton plat préféré ? Galettes indiennes avec une sauce à l’aubergine écrasée, de l’ail, des oignons, des épices, c’est un délice. Tout le monde devrait goûter ça mais la famille Mawem est la seule à pouvoir le faire
  • Ton aliment doudou ? Le Kinder (j’en abuserai dans quelques années)
  • Ta potion magique ? phycocyanine, jus d’orange, poudre vitaminée, un petit peu de lait et aloe vera.

Quant à Bassa, sa spécialité, c’est la vitesse. Qualifié comme son frère pour le combiné des Jeux Olympiques, il considère lui aussi que l’alimentation, comme le sommeil, font partie intégrante de son entraînement. Chez lui, une ligne de conduite : « manger de tout, en quantités raisonnables, un maximum de produits non transformés ». Rarement contre un petit dessert ou un goûter, il sait se faire plaisir par petites touches, afin de ne pas s’alourdir et nous confie « Je me lâche deux fois dans l’année : à mi-saison, lorsqu’il y a un creux et en fin de saison. Là, je me prends des gros paquets de M&M’s ou de Maltesers, et je mange tous les repas de l’avion. Je fais ma petite crise de boulimie ! Je mange tout, tout le temps mais ça doit durer quoi, deux jours. [rires]»

Le reste du temps sa discipline exige une sensation de légèreté – en dautres termes de confort digestif – peut-être encore plus quen bloc ou en difficulté. C’est pourquoi Bassa veille à consommer des aliments hautement digestibles. Le matin, il démarre avec un solide petit déjeuner composé de pain grillé au beurre parfois assorti de guacamole, une tranche de jambon et deux oeufs ainsi que des fruits et un verre de jus d’orange. « C’est ma seule routine, car après, pendant l’entrainement, je ne mange pas. »

Aux repas, les pâtes et les pommes de terre ont rarement droit de cité dans son assiette car il estime que ces aliments ne sont pas bons pour lui même s’il les adore. Il préfère manger « des légumes, du riz et du poisson, surtout avant les compétitions, même si ce n’est pas toujours possible selon les pays dans lesquelles elles se déroulent. »

Partenaire de la même marque de compléments alimentaires que son frère Mickael, Bassa précise qu’il consomme ces produits (ainsi que d’autres marques) parce qu’il a déjà une bonne hygiène de vie et que pour lui aussi la quantité d’aliments qu’il devrait ingérer pour couvrir tous ses besoins en micro-nutriments n’est pas compatible avec ses besoins caloriques.

Bassa Mawem en résumé

  • Petits repas ou grosses assiettes ? Grosses assiettes
  • Sucré ou salé ? Euh bah ça dépend…les deux…sucré-salé…allez, salé pour le coup !
  • Tartines ou croissants ? Tartines
  • Ton plat préféré ? J’ai pas de plat préféré mais j’adore les cacahuètes
  • Ton aliment doudou ? Je n’ai pas d’aliment doudou, je mange parce qu’il faut manger !
  • Ta potion magique ? Les cacahuètes aussi !

Texte: Amandine Verchère


[1] pigment bleu-vert présent dans la spiruline, une petite bactérie réputée pour sa richesse en protéines, vitamines et minéraux. Pour en savoir plus sur les effets anti-oxydants et anti-inflammatoires de la phycocyanine, lire l’article paru dans la revue Inflammation Research et publié par Romay, C., Armesto, J., Remirez, D. et al. Antioxidant and anti-inflammatory properties of C-phycocyanin from blue-green algae. Inflamm. res. 47, 36–41 (1998).

[2]ndlr : ce problème est généralisable à quasiment toute la population. Voir le reportage de l’émission 36°9 sur la baisse de la teneur en micro-nutriments des fruits et légumes actuels https://www.youtube.com/watch?v=FNyR_xvCv10

Publié le : 18 juillet 2020 par Charles Loury

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