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Brésil : Grimpe sur fond de carte postale et leçon de vie

- Le 29 novembre 2021 -

Notre ambassadrice PG, Svana Bjarnason, a embarqué il y a quelques mois sur le voilier Maewan (plus d’infos ci-dessous) direction le Brésil pour un projet escalade, surf et ateliers environnementaux et éducatifs avec des jeunes défavorisés. Elle nous raconte son périple hors du commun. 


Mai 2021. Le virus du COVID 19 bat son plein. Le nombre de cas augmente dans le monde entier et les variants exotiques font rage. On dit que la situation au Brésil est catastrophique. Et pourtant, lorsque j’apprends qu’Erwan (Le Lann) cherche des gens pour son prochain projet avec le voilier Maewan, au Brésil donc, je m’empresse de lui dire que je suis motivée. Un trip combinant ateliers environnementaux et éducatifs avec des jeunes défavorisés, escalade et surf (mes deux sports préférés au monde), au Brésil (un pays que j’avais adoré lorsque j’y avais été il y a quelques années), le tout en vivant sur un voilier ? J’avoue que je n’ai pas hésité très longtemps, c’était une de ces opportunités qui ne se reproduisent pas. Beaucoup ont désapprouvé, d’autres non, en ayant autant marre que moi de ce satané virus. Qu’importe, c’était ma décision et je ne la regrette pas une seule seconde. Je n’ai jamais eu le sentiment de risquer plus au Brésil qu’en France et d’ailleurs tout s’est très bien passé et personne n’a été malade.
Le porteur de ce projet (et ce qui aura été ma maison pour 3 semaines et demi) c’est le bateau et association Maewan, et plus précisément Erwan Le Lann (capitaine du bateau) et Marion Courtois (présidente de l’association). Si vous n’avez jamais entendu parler de cette asso je vous invite vivement à visiter leur site. Sa mission ? « Repositionner l’homme au cœur de son environnement pour répondre à un enjeu : Comment bien vivre ensemble dans un espace aux ressources limitées ?« . Support d’actions éducatives et environnementales animées par des sportifs de renommée, Maewan navigue autour du monde depuis maintenant 6 ans et demi. Le but est de s’arrêter dans des lieux précis afin de combiner pratiques sportives et actions locales, éducatives et/ou environnementales.

En juin 2021 le voilier est au Brésil, n’attendant que son équipage pour une aventure depuis Florianopolis jusqu’à Rio de Janeiro. Pour ma part j’ai rejoint le bateau aux abords de São Paulo. Pour cette étape brésilienne, l’équipage était initialement composé de Erwan, Marion, Monica Dalmasso (photographe), Juliana Petters (grimpeuse Brésilienne vivant actuellement au Yosemite), Lani, sa fille de 11 ans et moi-même. Ensuite à Rio nous fûmes rejoints par Antony Newton et Pablo Signoret (tous deux high liners et base jumpers) ainsi que Julie Mailhé, une française vivant au Brésil, experte du climat et travaillant pour des ONG.

Première étape – Ilha Bela

Fin juin 2021, fraîchement vaccinée, je m’envole donc pour São Paulo, mon ordre de mission avec Maewan et une bonne cargaison de masques dans la poche. Julie me récupère à São Paulo et, avec une de ses amies, nous prenons directement la route pour Ihla Bela, une petite île à quelques heures de route. C’est là que j’embarquerai sur Maewan, censé arriver le lendemain. Après une petite moqueca végétarienne, une baignade dans l’océan au coucher de soleil, une caipirinha (il faut bien se mettre dans le bain), et une tonne d’anti moustique local (cette île est peuplée de moustiques sortis droit des enfers, il faut vraiment un produit spécifique et il faut en remettre toutes les 2 heures. Sinon voilà le résultat (cf. photo), des boutons par dizaine qui démangent pendant plusieurs semaines), nous nous endormons dans une charmante pousada. Un réveil très tôt avec le décalage horaire, un petit déjeuner local avec un suco de abacaxi à tomber (jus d’ananas), puis nous retrouvons le voilier et l’équipage au Yacht club de Ilha Bela.

Ma première impression du bateau ? « C’est super petit, comment on va tenir à 6 là-dedans pendant 4 semaines ? Et pourquoi derrière les portes où il est écrit douche et WC il y a plein de matos et aucun équipement sanitaire ? Et pourquoi ça bouge AUTANT ?! » Bref je me dis que je ne vais jamais survivre. Mais finalement tout s’est passé à merveille, il faut juste s’habituer ! Bon j’avoue que le premier soir je n’ai pas fait la maline, j’ai refusé l’offre resto et caipirinhas et ai décidé de rester seule avec Maewan pour faire plus ample connaissance, en tête à tête. J’ai tenu environ 3min45 à l’intérieur avant d’avoir envie de vomir et de sortir sur le pont. Heureusement j’étais partie avec le remède magique dans mes affaires : la Nautamine. Des cachets contre le mal des transports qui m’auront sauvé le trip. Vraiment très efficaces, je recommande ! Cela aura tout de même pris une bonne semaine avant que je puisse rester assise à l’intérieur et 2 semaines avant de pouvoir couper des légumes (la tête baissée c’est la pire position). En revanche, il aura suffi d’une nuit pour avoir le mal de terre et 1min15 sur le haut du mat pour re-avoir le mal de mer. Mais c’est le jeu lorsque l’on vit sur une maison flottante !

Nous avons passé quelques jours sur l’île, à espérer trouver quelques spots encore vierges de toute ascension. Malheureusement nous n’aurons pas réussi, étant bloqués dans un périmètre assez restreint au Nord et Ouest de l’île, à cause des vents et du swell. Nous aurons quand même grimpé quelques blocs dans un environnement paradisiaque, mais rien d’incroyable. Pour info il existe un topo des spots de bloc sur l’île.

Deuxième étape – Ubatuba et Parati

Après ce temps d’exploration notre envie de grimper – pour de vrai – commençant à se faire ressentir, nous mettons le cap sur Pontão da Fortaleza, le petit paradis brésilien du bloc. Situé à Ubatuba, au bout de la plage de Fortaleza, cet endroit nous en met plein les yeux et l’arrivée en bateau rend ces moments encore plus magiques. Le rocher est incroyable, l’environnement exceptionnel et nous grimpons sur des blocs de pure qualité. Le grain est plus que broutant, la peau a rapidement mauvaise mine. Cependant, ne pouvant y rester que deux petits jours, nous essayons de grimper à fond et nous ne savons plus où donner la tête tant nous voulons tout essayer. La session coucher de soleil fut mémorable, la chute à l’eau d’Erwan arrivant sur le spot en paddle aussi. Bon à savoir, il y a plus de 100 passages ouverts et il existe également un topo. C’est un spot que je recommande vivement, je ne suis pas une grande amatrice de bloc à la base mais cet endroit m’a réellement donné envie d’y passer plus de temps.
Nous nous dirigeons ensuite vers la ville de Parati, située au sud de l’Etat de Rio de Janeiro, sur la Costa verde. Parati est une petite ville historique, témoin de l’époque coloniale portuguaise. L’architecture y est magnifique, des maisons colorées séparées par de larges rues pavées dans lesquelles s’engouffre l’eau lors des grandes marées et inondations. Le port est rempli de bateaux tous plus colorés les uns que les autres, l’endroit vaut vraiment le détour, il est très agréable de s’y balader. Anecdote marquante, il paraît que les rues étaient pavées comme cela pour empêcher les esclaves de s’enfuir. Effectivement je ne vois pas quelqu’un courir dans ces rues, il est déjà très difficile d’y marcher sans trébucher (et je n’ose même pas imaginer après quelques capirinhas).

Pour la petite histoire j’avais été il y a quelques années, en tant que touriste, et je me souvenais de blocs énormes sur la plage de Cepilho, sans toutefois savoir s’ils étaient grimpables ou non. Cepilho étant également un gros spot de surf nous décidons de nous y rendre afin de combiner escalade et glisse dans la même journée. C’est ainsi qu’un matin, nous partons du bateau en annexe puis prenons le bus à Parati, bien encombrés avec nos planches de surf, les affaires d’escalade, la crème solaire et le crash-pad. Il y a effectivement un énorme champ de blocs sur la plage mais malheureusement peu de possibilités de grimpe, le grès étant bien trop lisse. N’étant pas du genre à se laisser abattre, Erwan et moi enfilons tout de même les chaussons et nous amusons sur quelques blocs, dont cette belle fissure en high-ball. Ayant encore un peu d’énergie en nous, nous troquons ensuite les chaussons pour la combi pour une petite session de surf, suivie de quelques pão de queijo les pieds dans le sable.

Troisième étape – Secret spot

Pour cette troisième étape, le but était d’explorer un endroit découvert par Juliana quelques années auparavant, et de voir s’il était possible d’y développer un spot de voies. Nous arrivons sur place un matin, après une difficile remontée d’ancre (à la main, le petit plaisir d’Erwan) et une longue nav de nuit. Ayant fait mon quart assez tard je mets un peu de temps à émerger mais, lorsque je sors sur le pont, je n’en crois pas mes yeux. Cette falaise que nous apercevons est époustouflante. Nous sommes trop éloignés pour savoir si le rocher est bon ou pas, mais nous sommes super excités à l’idée d’aller voir. Erwan décide d’envoyer le drone pour déterminer la hauteur de la face, que nous approximons à 350 m. De quoi faire ! S’en suivent ensuite plusieurs jours dans les environs à explorer, discuter avec les locaux pour savoir comment accéder au pied de la falaise. Notre première option était de passer par la mer, en accostant au pied d’une dalle pour tenter de se frayer un chemin dans la jungle jusqu’au mur. Finalement, après discussions avec des pêcheurs locaux, nous réalisons qu’il y a une sorte de chemin qui mène au sommet et pourrait éventuellement servir pour aller au pied. Une première team composée de Juliana, Erwan et Monica décide d’ouvrir le bal et de s’y rendre, accompagnés par des locaux et des machettes. La conception brésilienne du chemin est légèrement différente de la nôtre puisqu’ils avanceront très lentement, au rythme de la machette coupant la tonne de branches, arbres, herbes et autres végétaux fous de la jungle. Erwan s’en donne à cœur joie, se sentant tout à fait dans son élément avec sa machette, trouvant n’importe quelle excuse pour décapiter la moindre branche dépassant. Arrivée au sommet la team hallucine. Un mélange de rocher noir, mousse verte fluo, cactus saillants et mer bleue en contrebas, les contrastes sont saisissants, c’est une vision magique. Pas de possibilité d’atteindre le pied de la falaise mais le bartassage dans la jungle en valait largement le détour.

Le lendemain, Erwan est déterminé pour refaire une tentative, ayant repéré un début de semblant de chemin pouvant éventuellement mener à notre Graal. Monica et moi l’accompagnons, et le roi de la machette fait son grand retour, se régalant pour nous créer un chemin. Mais la partie de rigolade est de courte durée et notre espoir s’en va lorsque nous arrivons au milieu de la jungle très sombre, remplie d’arbres beaucoup trop hauts et de lianes beaucoup trop emmêlées. Impossible de se repérer, nous avançons à tâtons, en marquant notre chemin via des coups de machette sur les écorces pour ne pas passer la nuit au milieu de la jungle. Finalement, après plusieurs heures et tentatives d’abandon, notre persévérance est récompensée car nous apercevons enfin un bout de rocher ! Du rocher noir strié de fissures horizontales, le tout formant de magnifiques dalles noires qui pourraient être grimpables si elles n’étaient pas couvertes de mousse. Avec un bon nettoyage, nous nous disons qu’il serait tout à fait envisageable d’équiper de belles lignes. Nous longeons encore la falaise en descendant, jusqu’à arriver à un point où nous ne pourrons aller plus loin. Le rocher que nous apercevons est hallucinant, complètement différent de son voisin. Nous faisons face à des sortes de taffoni s’étendant sur une longueur indéterminable. A côté un beau mur vertical qui pourrait être rempli de réglettes. N’ayant aucun matériel avec nous, il nous est malheureusement impossible de nous approcher plus (nous ne voyons qu’une infime partie de la face) et donc difficile de déterminer à quel point c’est grimpable ou pas. Mais au vu du rocher nous ne doutons pas que le secteur pourrait devenir un spot de dingue, avec beaucoup de matos, de nettoyage et de volonté. Pour le prochain trip Maewan ? En tout cas nous gardons ces images au coin de la tête, en espérant que cela mène à quelque chose un jour. Le dernier jour nous ne résistons pas à l’envie de retourner au sommet de la falaise, pour montrer l’endroit à ceux qui n’ont pas été et pour profiter une dernière fois de cette atmosphère irréelle.

Quatrième et dernière étape – Rio de Janeiro

Des étoiles plein les yeux, nous repartons en fin de journée direction Rio de Janeiro, ultime étape du trip. Nous avons environ 16 heures de navigation devant nous et du swell de travers, la nuit risque d’être longue. Heureusement les températures sont encore douces même en pleine nuit, les cuistots nous font un repas 3 étoiles, la mer est remplie de plancton phosphorescent qui s’illumine dans la trainée du bateau et les dizaines de cargos géants sont trop loin pour nous embêter. La traversée se passe donc sans encombre, et nous nous régalons des desserts lyophilisés Lyofood sous un ciel étoilé bien différent de notre ciel français.

Après 2 semaines passées dans des endroits peu, voire pas fréquentés, au milieu de la nature sans autre bruit que celui du clapotis de l’eau, l’arrivée sur Rio est écrasante. D’autant plus que nous posons le voilier au Yacht Club de Rio, au pied du Pao de Azucar et donc dans un endroit plutôt surpeuplé. J’avais passé 10 jours à Rio il y a 6 ans, sans y grimper mais j’en avais gardé un très bon souvenir, étant plutôt une fille de la ville à la base. Ce mélange d’urbanisation, de jungle, d’océan et de montagne m’avait paru à l’époque assez incroyable, le sentiment n’avait pas changé.

Cette fois-ci nous avions un beau programme : escalade dans la ville et ateliers éducatifs et environnementaux dans la favela de Babilonia et Chapeu Mangueira, située à proximité de notre voilier. Pour un peu d’histoire, les premières favelas datent de 1897, créées par les soldats fraichement rentrés de la guerre. Supposées être un lieu de vie provisoire, ces constructions en pleine colline sont pourtant toujours présentes de nos jours. Ces communautés tiennent leur nom d’une plante, la favela, qui était à l’époque très présente dans la région. Les favelas ont mauvaise réputation à l’étranger mais aussi dans leur propre pays. Constructions précaires, misère, insalubrité, violence et j’en passe. Alors oui, tout cela est vrai et pourtant j’ai découvert dans la favela de Babilonia et Chapeau Mangueira un monde merveilleux, coloré, vivant, dynamique, joyeux et plein de chaleur humaine. Il est vrai que certains jours sont agrémentés de tirs de balle, de cris de peur et douleur, mais les nôtres furent plutôt accompagnés des cris de joie des enfants, de rires et d’étoiles dans les regards.

Notre favela est séparée en deux parties, la partie Babilonia et la partie Chapeau Mangueira. Elles sont chacune dirigées par un cartel de drogue et comme ils le disent là-bas, au milieu se trouve le troisième cartel, les policiers corrompus. De nuit comme de jour, il y a en permanence une voiture de policiers à l’entrée de la favela, gyrophare clignotant et fusils apparents. La favela, c’est un art de vie purement brésilien, une expérience unique. Je suis infiniment reconnaissante d’avoir pu vivre cette aventure avec les locaux.

Le but de notre mission était de réaliser des ateliers éducatifs et environnementaux avec des enfants de la communauté, les sensibiliser à l’éco-citoyenneté. En parallèle nous allions aider des adultes (également de la favela) à monter des projets professionnels / sportifs. Pour ce séjour nous avons travaillé avec deux associations locales, Favela Sonha et Mawon du Monde, qui nous auront beaucoup aidé dans ce projet.

La veille de notre premier jour d’intervention, nous avons rencontré deux des dirigeants de Favela Sonha, Nativo et Daniel. Ils nous ont mis dans le bain tout de suite en nous montrant des vidéos très violentes, où l’on voyait des tirs de balle, des femmes pleurant et des mares de sang dans les escaliers. Ma première impression de cette favela a donc été de la crainte. Je savais que nous avions la protection du cartel, nous avions toutes les autorisations pour intervenir dans la communauté mais j’avoue qu’en voyant cela je me suis demandée ce que je faisais là. Pourtant le lendemain matin, lorsque nous sommes arrivés au gymnase où nous allions travailler, toute crainte s’est évanouie d’un coup en voyant tous ces enfants aux visages rieurs, jouant avec tout et n’importe quoi et essayant tant bien que mal de nous dire bonjour en français. A partir de ce moment-là tout n’a été que bonheur et une grande leçon de vie. La semaine est rapidement passée, dans la joie et la bonne humeur avec des enfants pleins d’énergie et des adultes très motivés par notre intervention. Nous avons pu faire une session de surf avec les enfants car un club de surf a été monté dans la favela, le Leme surf club, dirigé par Wendel. J’ai aussi réussi à trainer Erwan pour quelques sessions de surf aux aurores avec Lula et Bimba, deux enfants de la favela sur-motivés. Nous avons également pu faire grimper quelques enfants à proximité de la communauté, au bord de la plage. Une première pour eux et ils se sont régalés ! Pendant que certains grimpaient d’autres surfaient ou sautaient dans l’eau, toujours en riant.

Cette semaine s’est terminée par une expérience unique pour tous, la vision de Pablo et Anto marchant sur une highline installée au-dessus de la favela. Une première à Rio de Janeiro. L’organisation fut très compliquée, il a fallu demander plein d’autorisations et jusqu’au dernier moment nous n’étions pas sûrs de pouvoir installer la highline. Pourtant, à force de détermination et de négociations Erwan, Pablo et Anto ont réussi à trouver une solution et monter cette sangle au-dessus de Babilonia, aidés par les locaux. C’est un moment dont je garde un souvenir très émouvant car tout le monde était dehors pour les regarder, tout le monde s’est arrêté de vivre pour les encourager, même les policiers. Il y avait une ambiance de folie, tout le monde criait, c’était unique et magique. Je revois encore les regards impressionnés des habitants de la favela. S’en est suivie une soirée mémorable de fin de séjour, sur le rooftop à l’arrivée de la highline. Coucher de soleil, vue sur tout Copacabana et j’ai même pu prendre les platines avec Fred, un suisse exilé au Brésil. Bref, une expérience exceptionnelle et inoubliable.

En parallèle de cette aventure dans la favela, nous avons tout de même profité de tout moment de break pour aller tater le rocher de Rio. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’on n’a pas été déçus ! En un week-end nous avons pu faire une session de bloc de nuit, une grande voie sur le Pain de sucre et une session de couenne. Et tout ça sur du rocher de dingue, j’ai vraiment été étonnée par sa qualité. Rio est une ville qui offre énormément de possibilités de grimpe, sans jamais devoir aller trop loin. Depuis le yacht club il était possible d’aller faire du bloc ou des grandes voies à pied.

Pour aller au secteur de couennes, Barrinha, cela nous a pris environ 25 min en uber (et un prix ridiculement bas). Ce spot est petit mais la grimpe y est magnifique, plutôt de type rési sur petites prises, pour pas mal de voies dans le 8. Malheureusement les conditions étaient très moyennes lorsque nous y avons été, nous n’avons pas trop pu nous exprimer avec la chaleur et l’humidité. Mais je garde en tête quelques belles voies à cocher avec des températures plus fraiches !

Concernant les grandes voies j’ai pu en faire deux sur le pain de sucre, dont la célèbre et classique Via dos italianos + Segundo, 270 m de pur granite en 6a max. Sur les conseils des locaux (vu que nous y allions un week-end), nous sommes partis très tôt afin d’éviter de faire la queue dans la voie. A 5h30 c’est donc peu réveillés mais motivés que Marion, Erwan, Monica, Victor (un grimpeur local) et moi-même sommes partis en direction de Pain de sucre. Nous avons fait la marche d’approche dans le noir et sommes arrivés au pied de la voie au lever du soleil, un timing parfait. Et là, encore une fois, nous en avons pris plein la vue. Les longueurs étaient toutes plus belles les unes que les autres, celles en 6 pas si évidentes et la vue était juste indescriptible. Et quel plaisir d’arriver au sommet du célèbre Pain de sucre sans avoir pris le téléphérique comme tous les touristes ! Pour ma part j’ai profité d’une après-midi de libre pour faire une autre grande voie sur ce Pain de sucre, cette fois-ci de l’autre côté, en face Nord. Une voie plus courte et parsemée de plantes mais également superbe à grimper. Des pures dalles en 5, dans lesquelles il fallait impérativement savoir poser les pieds.

Enfin, côté bloc, nous avons été très agréablement surpris par notre séance nocturne au pied du Pain de sucre. Ayant eu vent d’une session organisée par les locaux, nous avons décidé de les rejoindre un soir. Il aura été très compliqué de trouver les blocs, il fallait d’abord entrer illégalement dans le parc Urca gardé par les militaires. Après hésitation nous avons donc escaladé le portail fermé et nous sommes engagés sur le chemin, sans trop savoir ce que nous faisions. Après coup nous avons su que le parc fermait mais que les grimpeurs et pêcheurs étaient tolérés la nuit et que nous ne risquions donc rien. Trouver les blocs tout seuls aurait été impossible pour nous dans la nuit noire, n’ayant jamais été auparavant.  Heureusement nous sommes tombés sur des grimpeurs qui rentraient de grande voie et qui nous ont gentiment accompagnés aux spots, où nous avons retrouvé la bande de bloqueurs locaux. S’en est suivie une session de grimpe à la frontale, dans une atmosphère humide mais très agréable et divertissante. Les blocs ne payaient pas de mine de nuit mais étaient en réalité super à grimper, je recommande !

Je regrette un peu de ne pas avoir eu plus de temps libre à Rio car cette ville m’a vraiment fait bonne impression pour la grimpe. Je ne m’attendais vraiment pas à cela, trouver autant de spots au milieu de la ville, qui plus est sur du rocher de telle qualité. Et le fait qu’il y ait de tout, bloc, grande voie, couenne, trad, est encore plus motivant. J’ai déjà envie de réorganiser un trip de grimpe là-bas, et dans le reste du Brésil.

Deux mois après être rentrée de Rio, j’ai encore du mal à atterrir. Je suis rentrée de cette aventure avec des étoiles plein les yeux et super inspirée. Il est difficile de mettre des mots sur ce qu’on a vécu dans la favela, mais j’en garde un souvenir de dingue. Les enfants et adultes que l’on a rencontrés étaient tout simplement époustouflants, avec une énergie incroyable, une motivation à toute épreuve et toujours le sourire aux lèvres. Ce sont nous, avec Maewan, qui étions venus leur apprendre des choses sur l’écologie, sur comment mener à bien un projet et poursuivre ses rêves, mais eux nous auront appris tout autant. Entendre ces rires jour après jour, malgré la violence et la misère dans laquelle ils vivent, c’est plus qu’inspirant. Cela aura été, je crois, une expérience très enrichissante pour nous tous. Merci du fond du cœur.

Je profite de cet article pour remercier mes partenaires sans qui ce trip n’aurait pas été possible : Edelrid, Looking for Wild, Tenaya et Planetgrimpe. Merci également à Symbioz et Looking for Wild pour les cadeaux pour les enfants (casquette, tee-shirts et sacs à pof qui, s’ils ne serviront évidemment pas pour l’escalade, ont direct été adoptés en tant que sacs à main !). Merci aussi à Nutripure pour des compléments alimentaires qui vont permettre à un sportif de la favela d’améliorer ses capacités.

Publié le : 29 novembre 2021 par Charles Loury

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