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Analyse des OQS : l’oeil de Manon Hily, athlète en lice pour tenter de décrocher sa place olympique !

Manon Hily a été l’une des quatre représentantes tricolores lors de la première manche des OQS à Shanghai la semaine dernière. 15ème de la compétition, elle a accepté de nous livrer ses impressions sur cet événement hors normes, loin des standards habituels pour bien des raisons…

Troisième et dernier acte de notre série d’interviews consacrée à l’analyse des OQS de Shanghai. Après le regard de Laurent Lagarrigue, coordinateur olympique de l’équipe de France et celui de Rémi Samyn, ouvreur, place à la vision d’une athlète qui a pris le départ des OQS de Shanghai la semaine dernière : Manon Hily.

Sacrée Championne de France de difficulté pour la deuxième fois consécutive au début du mois, la Réunionnaise a terminé 15ème de la compétition à Shanghai, remportant 26 points sur les 50 possibles.

Fatiguée mais plus motivée que jamais, Manon Hily a répondu à nos questions, juste avant de retourner s’entraîner en vue de la deuxième manche des OQS, qui frapperont dans un mois jour pour jour à Budapest.


Salut Manon, comment te sens-tu quelques jours après cette première manche des OQS ?

Je ressens la fatigue de la compétition, tant au niveau mental que physique. Mais je suis tellement motivée pour la suite ! C’est la dernière ligne droite, alors on met tous à profit toute notre énergie sur ces dernières semaines !

Juste après avoir remporté un nouveau titre de Championne de France au début du mois, tu déclarais que ton but à Shanghai allait être « de grimper libérée, d’être spontanée et confiante, de me battre et d’y croire jusqu’à la dernière minute ». Objectif atteint ?

Je dirais que oui et non ! Il y a eu tellement de tours et tellement de changements de rythme… Mais globalement, je suis assez contente de ma compétition. Je suis satisfaite de ma grimpe, j’ai grimpé dans le tempo demandé et je pense avoir répondu à la « commande ».

Mais pour être honnête, le niveau proposé en difficulté était à l’opposé de ce que j’avais pu voir au Championnat de France ou à l’entraînement dernièrement. C’était un style étouffant, qui rendait difficile le relâchement, au risque de se faire surprendre. Et en bloc je vais dire que je suis en pleine progression, avec des choses qui avancent dans le bon sens, donc je suis plutôt contente !

© IFSC

Les enjeux sont grands sur ces OQS ! À la clé, les dernières places pour les Jeux de Paris. As-tu senti une tension plus grande que sur les compétitions habituelles ?

Oui, il y a eu beaucoup de pression inattendue. Pour être honnête, quand on a vu que l’un d’entre nous s’était planté, on a compris qu’on n’avait pas le droit à l’erreur… Nous ne nous étions pas rendu compte de cela avant (en tout cas, je parle pour moi).

Cela fait deux ans que l’on se prépare, on se dit que l’on va faire deux compétitions (Shanghai et Budapest) avec plein de tours différents, mais au final, dès le premier tour de la première compétition, on pouvait sortir ! Et j’avoue que ça m’a fait peur ! On a beau être un sport individuel, ça m’a mis un gros coup de voir Micka [Mawem] passer à côté de son tour…

Sinon, je pense avoir assez d’expérience pour gérer la pression de ce genre d’événements. Bien sûr, j’ai des hauts et des bas, avec des moments de doutes, mais je sais les contrer. Il m’arrive d’avoir peur, mais je reprends vite le dessus. Certains grimpeurs ont réussi à grimper à leur niveau, d’autres ont moins bien réussi et je pense que c’est principalement lié à la pression exacerbée par la chaleur et la fatigue difficile à gérer.

Alors oui, je pense que l’on peut dire que la tension était plus haute pour ceux qui avaient moins l’habitude, mais certains ont bien montré que cela ne changeait rien ! Grimper, c’est tout ce que l’on nous demande au final !

Quel bilan tires-tu de ta compétition ?

Le bilan ? C’est celui qui y croit le plus longtemps et qui résiste le plus longtemps qui va passer les tours ! Je retiens que c’est l’endurance mentale et physique qui fait aller au bout. Et aussi que tout peut arriver jusqu’à la fin !

Je retiens également qu’il y a de moins en moins de spécialistes qui arrivent à faire la différence. Le format est aléatoire avec un système de points qui peut favoriser l’une des deux disciplines. Il faut donc être bon dans les deux et être préparé à tous les scénarios possibles ! C’est tellement éloigné de ce que nous vivons en Coupe du Monde. Le format est rythmé par beaucoup de grimpe, un repos difficile si l’on n’arrive pas à déconnecter entre les tours, de la fatigue qui s’accumule, donc une grimpe un peu différente. Il faut gérer très scrupuleusement la récupération, la peau, les moments entre les tours, passer du mode bloc au mode diff, se détacher des classements provisoires et des points… Cela fait beaucoup de choses en plus de notre seule tâche qui serait de « grimper » et qui est propre à ces OQS !

Et bien sûr, je ne parle du fait que nous sommes en concurrence directe avec les copines et les copains de l’équipe de France. C’est vraiment dur, mais nous sommes bienveillants entre nous et on reste une équipe soudée !

Y-a-t-il quelque chose qui t’a particulièrement surprise sur cette compétition ? 

Je pense que nous ne nous attendions pas à un tel niveau en difficulté. À l’entraînement, on parle de « voie combinée » mais au final, j’ai trouvé que ça ressemblait à une voie de Coupe du Monde classique. C’est bon à savoir pour se réajuster au cours des quatre prochaines semaines.

Quels sont les axes sur lesquels tu vas travailler ces prochaines semaines ?

Je vais garder tout ce que j’ai fait jusque-là parce que je pense que cela marche ! Ce qui veut dire être prête à répondre à tous les scénarios (je pense notamment au niveau qui était relevé en diff).

Je vais analyser tout ce qui s’est passé dans ma tête et tout ce que j’ai mis en place, de bien et de pas bien, pour faire encore mieux à Budapest !

Dans quel état d’esprit vas-tu aborder la deuxième manche à Budapest ?

Budapest sera le bout d’un process ! D’une belle aventure. Forcément le début d’une autre aussi, qu’il y ait les Jeux au bout du chemin ou pas. Comme je l’ai déjà dit, je ne veux pas avoir de regrets ! Je veux y croire jusqu’au bout, être fière de moi ! Je veux vivre cet événement comme il se doit, comme la récompense de tout ce que je travaille depuis des années.

Bref, j’ai envie de montrer le meilleur de moi-même !


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