Résumé des finales du Championnat de France de difficulté 2018
Dimanche 10 juin, 14h30. La salle du complexe sportif d’Arnas est bien remplie. Le public est venu en nombre assister aux finales de l’une des plus belles compétitions françaises de l’année : le Championnat de France de difficulté 2018.
Après des qualifications et des demi-finales de haute voltige, ces finales allaient sacrer les nouveaux champions de France 2018. Et cette année, ils étaient nombreux à prétendre à la couronne, avec de belles surprises comme Maëlys Agrapart, Jérémy Bonder ou Gautier Supper, venus se glisser entre les habituels favoris, comme Romain Desgranges, Thomas Joannes, Julia Chanourdie ou Salomé Romain.
Si finalement le titre reviendra aux leaders de l’équipe de France que sont Julia Chanourdie et Romain Desgranges, vivez ou revivez la façon dont ils l’ont emporté, à travers notre résumé complet des finales.
Des larmes de joie qui en disent long pour Julia Chanourdie
L’émotion prend le dessus. En descendant de sa voie, Julia Chanourdie se sait championne de France de difficulté. La chambérienne laisse alors sa joie s’extérioriser. Des larmes de bonheur coulent sur son visage et en disent long sur la performance qu’elle vient d’accomplir.
Ce titre, elle court après depuis de nombreuses années. Le potentiel, elle l’a depuis bien longtemps. Leader de l’équipe de France féminine, elle fait partie des meilleures mondiales depuis quelque temps déjà. Alors pourquoi ce titre seulement maintenant ?
Ces trois dernières années, je suis passée à côtés du titre, souvent pour de petites erreurs, comme si je ne me laissais pas le droit de gagner.
Mais hier, c’est une Julia déterminée qui est entrée dans la salle, sur le ring même. Dès ses premiers mouvements, on comprend qu’elle va monter très haut dans cette voie de finale. Rythmée, rapide, précise, la jeune chambérienne déroule sa partition. Dans le public, tout le monde comprend que la machine Chanourdie était en route. Une route qui allait la conduire jusqu’à la victoire. Arrivée au sommet, il est impressionnant de la voir passer avec facilité, là où toutes les autres finalistes étaient à bout de souffle.
Quelques mètres plus bas, le public scande son nom. Elle est la dernière grimpeuse du week-end et vient de dépasser la verticale limite précédemment fixée par Manon Hily. On la sait championne de France.
Julia atteint l’avant-dernière prise, prend le temps de se relâcher, de bien se positionner, avant de déclencher le jeté sur la dernière prise. Elle manquera ce dernier mouvement, mais qu’importe. Elle vient enfin de remporter le titre de championne de France senior de difficulté.
Devant un public qui l’acclame, Julia ne retient pas ses larmes et savoure l’instant. Elle qui courait tant derrière ce titre vient de l’emporter, démarrant de la plus belle façon cette saison 2018.
Je suis contente d’avoir pu prendre du plaisir dans cette voie de finale. Cette année, j’ai senti que je la dominais, ce que je ne ressentais pas les autres années. Je subissais, parce que dans ma tête je n’étais pas prête de m’offrir ce titre. Je suis heureuse de voir que petit à petit, j’accepte mon niveau et j’accepte de passer les étapes et d’aller viser toujours plus haut.
Celle qui monte sur la deuxième marche du podium est probablement la grimpeuse française la plus complète du moment. Vice-championne de France en titre de bloc, vainqueur du classement général des Coupes de France de bloc, vainqueur du classement général des Coupes de France de difficulté, 9a en extérieur et maintenant vice-championne de France de difficulté 2018. Le tout, dans la même saison, en l’espace de quelques mois à peine.
Certes, Manon Hily voulait monter plus haut dans cette voie de finale. Un peu plus tendue que d’habitude, elle chute au sommet de la voie, dans un mouvement qui demandait d’arriver encore frais pour réussir. Mais sa médaille d’argent ce week-end lui convient bien.
Enfin, c’est remplie d’émotion que Maëlys Agrapart réalise qu’elle est la troisième grimpeuse à compléter le podium. Après un Championnat de France de bloc raté quelques mois plus tôt et un début de saison internationale difficile, cette année ne prenait pas la tournure qu’avait envisagée Maëlys.
Alors, avec seulement trois semaines d’entraînement de rési dans les bras, elle décide de participer à ces Championnats de France de difficulté, pour renouer avec le plaisir de grimper. Tout simplement. Et c’est ce tout simplement qui fera toute la différence. Surprise de faire partie des demi-finalistes, elle l’est encore plus samedi soir, quand elle vient à bout de la voie de demi-finale. Faire partie du top 8 français et rentrer en finale, elle ne l’aurait pas imaginé. Alors hier, quand elle atteint la prise 44, synonyme de troisième place sur le podium, la jeune grimpeuse de Vertical Art fond en larmes au micro de Christopher. Quel bonheur de la retrouver sur un podium, ayant renoué avec le plaisir de grimper.
Ayant par la même occasion décroché sa place en équipe de France de difficulté, Maëlys reste tout de même prudente.
J’ai pris tellement de claques en bloc, que ça me faisait plaisir de participer à cette compétition. Je suis venue pour m’amuser. Bien sûr, cette médaille me fait poser des questions. Après ma saison en bloc, je me disais que ce n’était peut-être pas fait pour moi, j’avais des doutes. Je vais prendre quelque mois pour réfléchir sur ce que je veux faire.
Et si… Et si Maëlys Agrapart se mettait à briller sur les compétitions internationales en difficulté ?
Belle prestation également de la part de Nolwen Berthier. La grimpeuse de Mroc Climbing, connue pour être autodidacte, chutera au même endroit que Maëlys. Départagée par rapport aux résultats des demi-finales de la veille, elle reste au pied du podium, décrochant tout de même sa place en équipe de France.
Prendre plaisir sans se prendre la tête. C’était l’objectif que c’était fixé Hélène Janicot en participant au championnat national ce week-end. L’ex-grimpeuse de l’équipe de France avait été très claire dès le début de la compétition « Même si je gagne, je ne participerai pas aux Coupes du Monde ».
D’ailleurs, Hélène ne fera pas partie de l’équipe de France cet été, mais de l’équipe d’ouvreurs sur la Coupe du Monde de Chamonix.
Sans trop d’entraînement, Hélène monte haut dans cette voie de finale, chutant dans le même passage délicat que Maëlys et Nolwen pour prendre au final la cinquième place.
Beau run de la part de Nina Arthaud, vice-championne de France junior en titre, qui termine ce week-end sixième chez les seniors.
Déçue, Salomé Romain espérait faire mieux hier dans cette voie de finale. Il lui manquera quelques millimètres pour saisir la prise 41, qui demandait une bonne fermeture de bras. Elle termine 7ème des finales, devançant la marseillaise Kenza Slamti, 8ème.
Un belge qui gagne la compétition, mais un Romain Desgranges sacré champion de France.
C’est un scénario de finale un peu particulier auquel nous avons assisté chez les hommes hier après-midi, dans une voie elle aussi bien particulière.
Car jusqu’à la prise 39, la voie de finale masculine n’était pas si dure. Certes, le jeune Arthur Guinet se fera piéger dans le premier jeté en début de voie. Mais finalement, les ¾ des finalistes se tiennent à moins d’une prise d’écart…
Aucun français ne dépassera la lèvre du toit, censé être la partie la plus délicate à gérer. Tous se feront piéger au mouvement 42.5, ou 43. En effet, deux gros volumes sphériques sans grains feront chuter six des huit finalistes.
D’abord Jérémy Bonder puis Romaric Geffroy, suivi de Sam Avezou, Thomas Joannes et Nao Monchois. Gautier Supper réussira à tenir une prise de plus, mais se fera éjecter au mouvement suivant.
C’est alors le belge Stéphane Hanssens qui fait le show. Habitué des compétitions françaises, il est venu se faire plaisir sur notre championnat national. Car le sien ne s’est pas vraiment déroulé comme il l’espérait il y a quelques jours. Jouant la gagne chez lui en Belgique, il était relégué au pied du podium.
Hier après-midi, le belge a fait le show dans la voie de finale. Déroulant sa grimpe de manière très fluide, il atteint ce fameux passage délicat, qui ne le fait pas trembler. Il parvient alors à continuer la voie, étant le premier à nous faire découvrir le sommet. Quelques mouvements de plus, et Stéphane trônait fièrement accroché au bac final de la voie, venant tout simplement de l’enchaîner avec la manière.
J’ai fait un bon run en finale, j’ai grimpé sans pression, je n’avais rien à perdre à part prendre du plaisir. Je vais essayer de garder cet état d’esprit sur les Coupes du Monde.
Mais bien entendu, un belge ne peut pas être le nouveau champion de France. Bien que très belle, sa performance ne compte pas pour la course au titre national.
Alors avant le passage du dernier grimpeur, Gautier Supper, qui renouait avec les compétitions, était toujours le n°1 du classement provisoire. Venu pour le plaisir de grimper, Gautier était avant tout là pour se faire plaisir, sans de réels objectifs sportifs derrière.
Et voilà que le dernier grimpeur à s’élancer chez les hommes faisait son entrée. Et quel grimpeur : Romain Desgranges, champion d’Europe en titre et n°1 mondial, ayant remporté trois Coupes du Monde de difficulté l’an dernier.
Le chamoniard n’est pas là pour rigoler. Il compte bien récupérer le titre de champion de France, qui lui échappe depuis deux ans maintenant.
À l’image de Julia Chanourdie, le leader de l’équipe de France déroule sa grimpe de manière très propre. Des kilomètres de grimpe, il en a au compteur en 15 ans de carrière. Physiquement très solide, il serre les prises fixées sur les deux gros volumes sphériques. Mais voilà qu’il doit clipper la dégaine avant de continuer, après quoi, il lui sera impossible de le faire. Essayant de trouver une position confortable pour pouvoir relâcher sa main gauche le temps de réaliser la manipulation, son pied zippe du volume. Romain tente alors de s’accrocher comme il peut au volume, mais ce dernier l’éjecte du mur.
Frustré, Romain aurait voulu sortir cette voie. En descendant, personne ne connaît encore le verdict final. Gautier Supper et Romain Desgranges ayant chuté au même endroit et réalisé la même prestation en demi-finale hier doivent être départagés au chrono.
L’aisance du chamoniard dans le début de la voie lui vaudra le titre de Champion de France 2018, mettant 1 minute et 10 secondes de moins que Gautier Supper.
L’objectif de ma saison, c’est les Championnats du Monde en septembre à Innsbruck. Du coup j’ai décalé ma préparation pour avoir mon pic de forme à ce moment. Ça fait seulement quinze jours que je refais un peu de voie.
C’est ainsi que s’achèvera ce Championnat de France de difficulté 2018.
Maintenant, place aux compétitions internationales, qui arrivent très tôt : le premier rendez-vous mondial de la saison aura lieu à Villars, en Suisse, les 6 et 7 juillet, avant les traditionnelles Coupes du Monde Chamonix et Briançon les deux week-ends suivants.