Manu Cornu revient sur sa saison 2023
Alors que la saison 2023 se termine tranquillement, nous sommes allés à la rencontre de quelques grimpeurs pour faire le point, et le premier à tirer le bilan de son année n’est autre que Manu Cornu. Une année compliquée pour Manu qui aura jonglé entre les blessures et les contre performances, mais rassurez-vous, le tigre n’a pas dit son dernier mot!
La saison 2023 s’est ouverte avec le championnat de France de bloc à valence, peux tu revenir dessus?
Comme chaque année on débute la saison par le championnat de France de bloc, qui est le rendez-vous majeur après le premier cycle de préparation. Ce n’est plus un objectif pour moi depuis 4/5 ans maintenant, mais ça me permet de reprendre des sensations, voir où j’en suis. C’est souvent mon retour à la compétition et cette année ça n’a pas été simple.
Je ne me suis jamais senti présent durant cette compétition: à l’échauffement déjà, mes sensations n’étaient pas top, la qualification a été difficile alors que les blocs me semblaient être à ma portée avec du recul. Je suis passé à côté de mon tour de qualif mais c’est passé de justesse. Je n’ai pas réussi à me remobiliser pour les demies du lendemain pour aller en finale, je ne sais même pas si on peut dire qu’il y avait du mieux.
Qu’attendais-tu de cette compétition?
J’attendais d’être sur le podium, ou du moins, au minimum d’être en finale, j’en avais pris l’habitude vu que c’est la première finale que je manque en France depuis 2015 … Je suis passé à côté, et au vu de ce que j’ai proposé et du niveau national actuel, il ne fallait pas s’attendre à mieux.
Quels enseignements en as-tu tiré?
Ça te fait garder en tête que rien n’est donné. J’ai cherché à savoir pourquoi c’est arriver mais j’ai quand même gardé la tête froide, j’étais confiant sur ce qu’on faisait a l’entraînement, j’ai fait beaucoup trop d’erreurs en grimpant mais aussi dans la gestion de mon circuit. J’ai été plus vigilant la dessus sur la période qui a suivi.
Par la suite raconte nous comment se sont déroulées les étapes de coupe du monde et ce qui t’a mis en difficulté ?
J’ai eu un peu plus d’un mois pour rebondir avant les coupes du monde. Je me suis déplacé sur quelques compétitions pour retrouver des sensations et arriver prêt. Ça allait mieux, et puis là encore ça a été compliqué: 4 jours avant le départ en Asie la médecin de la fédération hésitait à m’interdire de voyager. Depuis début février j’ai une douleur au coude gauche, au début c’était léger, je la sentais juste à l’échauffement, on en a parlé avec le kiné, on a essayé de gérer pour que ça passe, j’ai pris une grosse chute dessus et ça n’a pas arrangé les choses. Mon coude a commencé à gonfler, une semaine avant de partir je ne pouvais plus grimper, ça ne dégonflait pas, au point qu’on fasse une ponction, on m’a diagnostiqué un staphylocoque doré la veille du départ.
Sans l’histoire de la qualif aux jeux, je serai resté à la maison, j’auras pris le temps de me soigner correctement, mais j’ai fait mes choix. Je m’imaginais être capable de grimper à Séoul et faire l’impasse sur Tokyo, au final j’ai fait les 2 compétitions: la première de la saison c’était juste pour grimper, la deuxième à Séoul et cette 5ème place relève plus de l’exploit, mais au vu de la situation dans laquelle j’étais, j’avais pris des points et j’étais satisfait du séjour.
Quand je suis rentré j’ai eu le droit à de nouveaux examens: déchirure au tendon pronateur gauche, on a réadapté l’entraînement pour me permettre de continuer la saison. J’ai fait avec pour Salt Lake City, même si parfois je ne pouvais pas enchaîner 2 séances de suite. À Prague c’en était trop: après le bloc 2 de qualif je voulais arrêter le tour, je voulais arrêter de grimper, je ne m’amusais plus, je n’étais pas heureux, c’est la première chose que j’ai dit à Nico (ndlr. Nico Januel, coach de l’équipe de France) en sortant: ça y est, il faut qu’on arrête.
Je suis rentré à Paris, j’ai vu la médecin, on est parti sur 3 semaines de break avec de la mésothérapie pour essayer de régler le problème, et que je puisse revenir sur les championnats du monde, même si à ce moment là, je ne voulais même pas en entendre parler. J’ai repris doucement, mon coude va mieux mais aujourd’hui encore je ne peux toujours pas faire ce que je veux.
L’objectif principal était donc le championnat du monde, comment as-tu vécu cette compétition ? Que t’a-t-il manqué pour faire mieux? Comment tu as rebondi ?
Je suis allé à Berne pour faire un bon championnat du monde de bloc et essayer de prendre ma place pour le combiné. Après cette année compliquée, ça résonnait pour moi comme une revanche: je suis revenu en faisant une bonne qualif de bloc, je n’avais pas pu grimper en diff depuis février donc on a joué la stratégie en délaissant la qualif de la diff. Il n’y avait quasiment aucune chance de prendre des points et ça me rajoutait un jour de repos pour la demie du bloc. Le lendemain ça se joue à un petit zip au dernier mouvement de la dalle pour me glisser en finale, beaucoup de frustration à l’issue de ce tour mais avec du recul j’ai fait une bonne compétition.
J’ai écouté mon corps, un petit peu les médecins et surtout j’ai pris le temps d’avoir envie de revenir: avec Nico Januel et Oriane Bertone à l’entraînement c’était plus facile.
Peux-tu nous dire comment va se passer la suite du processus de qualification pour les jeux ? As-tu encore une chance de pouvoir décrocher un ticket pour les J.O. ?
La suite du process, c’est très simple, on a toujours pas de français qualifié chez les gars, 2 compétitions qualificatives qui arrivent, 4 places pour représenter la France sur ces événements, 2 places à prendre pour Paris.
Aujourd’hui, je suis remplaçant, vu que je suis cinquième de l’équipe, je préfère penser que Paris pour moi, c’est terminé. Je souhaite aux quatre gars devant moi de prendre une place et de tout faire pour faire de belles prestations.
Moi de mon côté je vais continuer de m’entraîner sur les deux disciplines jusqu’aux JO en me mettant au service d’Oriane, en la poussant à se dépasser, et en continuant à lui mettre des buts, ma nouvelle mission pour Paris c’est ça, c’est un projet différent mais c’est aussi une option beaucoup plus motivante qui me permettra d’être prêt si je dois remplacer un des gars.
Comment envisages-tu la suite de ta carrière ?
Je ne compte pas arrêter l’escalade, ni la compétition, je me sens toujours très motivé mais j’ai eu quelques soucis qui m’ont empêchés de m’exprimer au mieux cette saison. Après le coude j’ai enchaîné avec la cheville… Je vais prendre le temps de me soigner et de travailler, et je reviendrai: il y a beaucoup de compétitions, beaucoup d’objectifs potentiels.