Carton rouge: Quand l’IFSC décide de changer la catégorie d’un athlète para en plein milieu d’une compétition
Alors que nos yeux sont actuellement rivés sur l’épreuve de bloc de la coupe du monde à Innsbruck, il ne faut pas oublier que la compétition débutait par une étape de coupe du monde paraclimbing.
Et pour l’occasion, l’équipe de France était bien présente, et pour preuve: Thierry Delarue (Union sportive Cagnes) et Lucie Jarrige (Guichen Escalade) en AL2, Solenne Piret (Le 8 Assure) en AU2 et Aloïs Pottier (CAF Caen competition) en RP1 remportent l’étape de coupe du monde para-escalade à Innsbruck (AUT). Julien Gasc (ES Massy) en AL2 et Bastien Thomas (SMUC escalade) en RP3 remportent l’argent et Maxime Meyer (Entre-Temps) en AU3 le bronze.
7 médailles dont 4 en or, difficile de faire beaucoup mieux, le paraclibming se porte très bien du côté français. Si on s’arrêtait à ces résultats, on pourrait croire que tout s’est extrêmement bien déroulé. Ce n’est pas tout à fait le cas, notamment pour Erwan Lievin, qui concourrait en AU2, avant de changer de catégorie (AU3) en plein milieu de la compétition et de se voir disqualifier. Comment cela est-il possible? On vous résume le déroulé de cette histoire, pas banale, qui marque un manque de respect total de l’IFSC pour les athlètes …
Tout d’abord, il faut savoir que lorsque des athlètes para se présentent en compétition internationale, un passage devant un médecin de l’IFSC est obligatoire afin que l’athlète soit bien placé dans la bonne catégorie.
Concernant Erwan Lievin, lors de ses débuts à l’international l’année dernière, les médecins l’avaient placé dans la catégorie AU2 (amputé du membre supérieur). Il s’agissait d’une année test, ce qui signifie que l’année suivante un nouveau contrôle du médecin de l’IFSC est organisé.
Il faut savoir qu’Erwan a encore les 2 premiers os du poignet, mais ce dernier n’est pas fonctionnel dans le sens ou il ne peut pas l’utiliser pour prendre des prises. Précisions également que cette année une nouvelle catégorie est apparue, « AU3 » une catégorie où les grimpeurs ont de « vrais poignets » voir des début de phalange à l’image du fort grimpeur Israëlien Mor Sapir.
Mais alors que s’est il passé à Innsbruck…? Erwan nous raconte.
J’arrive à la coupe du monde d’Innsbrucks où je vais me refaire faire classifier. Suite à à ce test où j’ai même du grimper devant eux pour qu’ils s’assurent de me mettre dans la bonne catégorie, je me vois classifié AU2 comme l’année dernière.
Le jour des qualifications je grimpe vraiment bien, en tout cas je suis fier de ce que j’ai fait et j’arrive à me qualifier en finale grâce à un mouvement en plus sur ma deuxième voie. Évidemment j’étais super content, j’avais même réussi à battre celui qui était arrivé devant moi à Villars l’année dernière !
A la fin des qualifications, bien 1h /1h30 après mon dernier passage Aristote Liontos (entraîneur de l’équipe de France para) et Maxime Gairin ( kiné de l’équipe) sont appelés par les médecins / classificateurs. 10min plus tard ils viennent me chercher pour aller voir les classificateurs ensemble. Et la ils nous annonce qu’ils m’ont observé grimper à nouveau pendant les qualifications et qu’ils ont décidé de me changer de catégorie et de me mettre en AU3… Le tout justifié par des excuses qui ne sont même pas valables, en m’expliquant que je pourrais arquer les prises avec mon moignon et que je pouvais utiliser mon poignet… Si je pouvais arquer des prises avec mon moignon que j’ai depuis ma naissance je pense que je le saurai…
Le plus insensé arrive… Erwan est donc reclassé dans la catégorie des AU3. Petit hic, il n’a donc pas participé aux qualifications de cette catégorie, et se voit donc tout simplement disqualifié. Les appels des coachs n’y changeront hélas rien.
Alors la question qu’on se pose est la suivante: comment est-ce possible ? La seule réponse à nos yeux aujourd’hui et celle de l’incompétence de l’IFSC. La moindre des choses aurait été de laisser terminer la compétition à Erwan, quitte à le changer de catégorie sur les prochaines échéances internationales. Comment peut-on autant manquer de respect à un athlète quand on connait la préparation et les sacrifices qu’il y a derrière le haut niveau ?
Erwan participera donc en AU3 sur les prochaines compétitions, mais selon lui, aucune chance physiologiquement de gagner dans cette nouvelle catégorie qui lui est attribuée.