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Une ascension incroyable sur la face nord de l’Eiger pour Barbara Zangerl et Jacopo Larcher !

Barbara Zangerl et Jacopo Larcher au sommet de l'Eiger © Alpsolut Pictures

Lundi 14 septembre 2020, le grimpeur italien Jacopo Larcher et l’autrichienne Barbara Zangerl ont réussi à enchaîner dans la journée «Odyssee» 8a+, sur la face nord de l’Eiger. 

« Odyssee » a été libérée pour la première fois en 2015, par Roger Schaeli, Simon Gietl et Robert Jasper et est considérée comme la grande voie la plus difficile libéré en libre sur l’Eiger.

En effet, la ligne, qui mesure 1400 mètres, se compose de 33 longueurs, avec des difficultés allant jusqu’au 8a+. Ce n’est pas la première fois que le couple Larcher/Zangerl enchaîne cette grande voie. En effet, en 2018, les deux grimpeurs avaient déjà atteint le sommet, en quatre jours. Mais cette fois, il ne leur a fallu que 16 heures pour enchaîner l’intégralité des 33 longueurs. Un record !

En 2018, nous avons essayé « Odyssee » pour la première fois. Le but était de grimper le plus haut possible et d’essayer d’enchaîner en libre chaque longueur de cette grande voie, réputée pour être l’ascension la plus difficile sur l’Eiger.

Nous avions pris tout ce dont nous aurions besoin pour dormir sur la paroi quelques jours, mais nous ne savions pas exactement combien de temps il nous faudrait pour atteindre le sommet, et même si nous y arriverions, car nous ne savions rien des difficultés de la voie.

Lorsque nous avons atteint le sommet à midi le jour 4, nous n’aurions pas pu être plus heureux. Être au soleil, là-haut, avec la Jungfrau en arrière-plan… Quelle vue et quelle expérience intense sur l’Eiger ! »

À ce moment précis, une idée complètement folle leur survient: réussir à grimper cette monstrueuse ligne de 33 longueurs en moins d’une journée ! Le défi était de taille pour ces deux grimpeurs expérimentés.

Jacopo Larcher aux prises avec « Odyssee » © Alpsolut Pictures

Nous savions que cela deviendrait un objectif pour les prochaines années à venir. »

Car jusque-là, le binôme n’avait jamais tenté de battre des records de vitesse en grande voie. Ce qui leur importait, c’était de réussir à enchaîner en libre les lignes les plus dures du monde. Mais cette fois, Barbara et Jacopo étaient intrigués de voir jusqu’où ils seraient capables de repousser leurs limites dans « Odyssee ».

Ainsi, cette année, à la mi-août, l’italien et l’autrichienne retournent sur l’Eiger. Leur but ? Retourner dans la voie pour travailler certains détails et tenter d’enchaîner les passages les plus difficiles le plus rapidement possible. Les conditions n’étaient alors pas idéales, un nuage ayant élu domicile au beau milieu de la grande voie, rendant les prises très humides. Heureusement pour le couple de grimpeurs, une fois le nuage parti au bout de quelques jours, le soleil fit son retour, les laissant préparer le terrain à leur convenance. Malheureusement, pris par le temps, ils n’auront pas la possibilité de tenter un essai depuis le bas au mois d’août.

Il s’est mis à neiger et rapidement il y a eu un demi-mètre de neige fraîche au sommet de l’Eiger. Cela aurait pu être la fin de notre trip. Est-ce que cela avait encore du sens de consacrer encore du temps et de l’énergie à cet objectif, alors que nous savions que les bonnes conditions étaient probablement terminées pour toute la saison ?

Nous avons tenté de rester positifs et avons décidé que si une bonne fenêtre se présentait, nous profiterions de l’opportunité pour mettre un ultime essai. »

Et cette fameuse fenêtre météo s’est présentée. Du moins, elle proposait les conditions les moins pires pour la saison. Ni une ni deux, nos deux grimpeurs étaient au pied de la ligne.

Nous avons grimpé vite, nous avions vraiment de bonnes sensations sur la partie la plus dure du mur. Puis soudainement, nous avons entendu de l’eau couler d’en haut. »

Quatre longueurs entre le 6c+ et le 7c étaient complètement trempées. Jamais Barbara Zangerl et Jacopo Larcher n’avaient autant serré les prises dans des longueurs de ce niveau. Il faut dire que sur des prises gorgées d’eau, une zipette de pied ou de main est très vite arrivée. Mais grâce à un énorme combat de la part de ces deux grimpeurs, ils parviennent à venir à bout de ces quatre longueurs mouillées dans leur intégralité.

Une ambiante glaciale sur la paroi de l’Eiger © Alpsolut Pictures

« On l’a fait ! », nous nous sommes dit. »

Après ce passage délicat, Barbara et Jacopo ne font qu’une bouchée des longueurs suivantes. À peine 16 heures s’étaient écoulées et la cordée était seulement à trois longueurs du sommet.

Jacopo et moi étions sûrs à 100% que c’était plié. Mais l’Eiger reste l’Eiger. Vous ne pouvez jamais être sûr de quoi que ce soit.

Car soudainement, la journée entière a totalement basculé et est probablement devenue la journée d’escalade la plus difficile que nous ayons jamais eue. L’Eiger peut être très joli, mais en très peu de temps, il peut changer radicalement et vous ressentez alors à quel point la face nord peut vraiment être capricieuse ! »

En effet, des trombes d’eau s’abattent alors que Barbara était au beau milieu de l’avant-dernière longueur. Complètement trempée, sans aucun moyen d’atteindre un relais ni de redescendre, Barbara doit redoubler d’efforts pour tenter de rejoindre son compagnon. Les températures chutèrent alors à une vitesse folle, si bien que l’eau se transformait en glace. Pour preuve, à la redescente, la cordée effectuera 31 longueurs en rappel au milieu de cascades de glace s’étant formées suite à cette intempérie.

Pas d’autres choix que d’abandonner… Si près du but. Pourtant, l’essentiel n’était pas là pour le couple de grimpeurs:

Lorsque nous avons regagné notre bivouac et nos sacs de couchage, à 22h00, nous ne pouvions pas être plus heureux. C’était mieux que n’importe quel sommet ou n’importe quel enchaînement. Nous étions si contents d’être revenus sains et saufs. Le fait que nous ayons dû renoncer alors que nous étions sur l’avant-dernière longueur n’avait même pas d’importance. Nous apprenons toujours de nos expériences en montagne ! Nous avions fait une erreur de jugement et nous avions eu des ennuis.

Alors que nous descendions, nous nous sommes dits que nous devrions peut-être être se contenter de cette performance et en rester là. Ce fut l’expérience d’escalade la plus difficile de ma vie. Voulais-je vraiment la répéter ? »

Toutefois, à peine avaient-ils atteint leur bivouac, complètement frigorifiés et trempés, que Barbara Zangerl et Jacopo Larcher avaient déjà fait le choix d’y retourner. Ils ont dû alors attendre une nouvelle fenêtre météo. Deux jours après leur précédent essai, les conditions semblaient favorables, avec une météo parfaite, sans risque d’orage.

Encore courbaturés de leur précédente expérience, ils se lançaient au départ de la première longueur ce lundi matin, à 1h30. La partie la plus dure de la grande voie était encore bien humide, mais au moins, ils n’avaient plus à évoluer sous la pluie. Ils grimpèrent alors les 16 premières longueurs dans la nuit, mais avaient 3 heures d’avance sur leur précédente tentative !

Nous étions sur-excités et nous prenions beaucoup de plaisir à grimper aussi vite que possible dans les dernières longueurs de la voie. »

Ainsi, très rapidement, la cordée atteint l’endroit où ils avaient dû faire demi-tour 48 heures plus tôt. Cette fois, le ciel était parfaitement dégagé. Les mouvements leur paraissent bien plus faciles que lorsque la ligne était trempée.

À 17h30, nous étions tous les deux au sommet. Nous étions ravis ! C’était une expérience vraiment difficile et exigeante pour enfin réussir sur cette mythique face nord de l’Eiger. Quelle aventure inoubliable !! »

Ainsi, en très exactement 16 heures, Barbara Zangerl et Jacopo Larcher avaient enchaîné en libre les 33 longueurs d' »Odyssee ». Ce temps est le plus rapide jamais enregistré sur cette voie.

Leur incroyable aventure a été filmée et figurera dans un prochain film de Black Diamond.

Cette ascension si particulière aura été une expérience incroyable pour ces deux grimpeurs ! © Alpsolut Pictures

Publié le : 16 septembre 2020 par Nicolas Mattuzzi

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