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Le Tuyé, le pan du terroir!!

Une salle de bloc associative, des idées et des projets plein la tête…

Ça va fumer dans le Tuyé !!

L’escalade en salle explose (notamment en bloc) et ce n’est pas l’annonce quasi-quotidienne d’ouverture de nouvelles salles qui viendra me contredire !! Les raisons sont multiples et ont des origines bien différentes. Pratique à part entière pour certains, ludique et conviviale pour d’autres, une salle de bloc pourra aussi être un simple support d’entrainement pour aller « perfer » en falaise. Toujours est-il que cette pratique fait de nous, pour une grande majorité, des consommateurs.

Les grimpeurs seraient-ils condamnés à  devenir « clients » ?

Si on observe l’offre actuelle, un grimpeur n’a finalement pas énormément de choix pour pratiquer l’escalade.

S’offre à lui le monde associatif, représenté par les clubs et les contraintes qui vont avec comme des structures mises à disposition par les municipalités pas toujours au niveau de ses attentes, des créneaux horaires restrictifs… mais à un prix contenu et avec la possibilité d’être accompagné dans sa progression voir d’être formé (diplôme d’initiateur, d’ouvreur…).

Un grimpeur peut faire le choix (licencié ou non) de ne grimper que sur des sites naturels. Mais on n’habite pas tous à Fontainebleau ou dans le sud de la France…

Enfin, et depuis peu, un grimpeur peut s’affranchir d’un droit d’entrée ou d’un abonnement pour accéder aux services d’une salle privée. Finalement, on l’a toujours fait pour une piscine, une salle de fitness ou un créneau de squash…

Oui mais dans le Doubs, la révolte s’organise !!! Des irréductibles grimpeurs ont fait le choix de vivre et de faire vivre l’escalade « en salle » avec une approche différente : Bienvenu au Tuyé.

Le tuyé est le cœur, le foyer, l’âme de la vie des montagnons. Le Tuyé est une cheminée traditionnelle Franc-comtoise servant à fumer les fameuses saucisses de Morteau. Vous sentez cette bonne odeur de terroir ? Car c’est bien de cela dont il s’agit : « le Tuyé, le pan du terroir ».

Basé dans le Doubs, sur la commune d’Epenoy, Le Tuyé est aussi le nom d’une association en cours de création qui aura pour grande finalité la promotion de l’escalade sous toutes ses formes, et qui s’appuie sur un pan construit dans la grange d’une ferme Comtoise. Une initiative née sous l’impulsion (entre autres) de Théo DENIER, figure bourguignonne qui a quitté son non moins célèbre pays de la Nièvre pour le Doubs. Rassurez-vous, je travaille déjà sur un article consacré à la géographie et aux départements…

Premier objectif : rassembler les grimpeurs locaux :

Grâce à une situation géographique idéale, le Tuyé peut et souhaite devenir un haut lieu de grimpe du département  en répondant à une forte demande liée au faible développement des salles dans le Doubs.  Avec des prix d’accès modestes destinés uniquement à couvrir les frais de fonctionnement et les besoins matériels ainsi que des créneaux d’ouverture larges et libres, le but sera de rassembler tous les grimpeurs, du falaisiste convaincu au jeune « résineux » au sein d’un bien commun. Un projet ambitieux mais qui a le mérite de défendre des valeurs et une certaine vision des choses.

Pour promouvoir l’escalade et faire vivre ce projet, le Tuyé souhaite développer les partenariats avec les clubs, écoles ou entreprises désireux de profiter de la structure au moyen de créneaux réservés (ponctuellement ou régulièrement).

L’association aura également pour mission l’organisation d’évènements visant à promouvoir l’activité par le biais par exemple d’open de bloc, de compétition inter-club, d’exhibition…

Et alors ce pan ???

Quand on connait un peu la faune locale, on ne pouvait s’attendre qu’à du lourd !! Et force est de constater que l’on n’est pas déçu. L’équipe de bénévoles n’a pas chômé pour que le pan voit le jour. Voyez un peu :

– Environ 80 m2 au sol pour 200 m2 de surface grimpable et jusqu’à 4m50 de hauteur.

– Un budget d’environ 20 000 € (hors prises) pour créer la structure (ossature, isolation, structure et panneaux…).

– Une douzaine de profils & agrès (40°, 30°, proue, vague, toit, dalle, diamant, arche, Güllich, escalier inversé, poutres, barres et suspensions).

– 9000 inserts pour une trame de 45 unités/m2.

– Un besoin initial d’environ 3000 prises et volumes.

 

Comme tout projet associatif, le Tuyé n’échappera à la règle : sa pérennité ne passera que par l’investissement personnel des membres de l’association. J’en profite d’ailleurs pour inviter quiconque qui souhaiterait d’une manière ou d’une autre aider le Tuyé dans son développement à se faire connaitre. Et si par hasard, un gentil marchand de prises souhaite s’associer au projet, promis-juré-craché, il ne regrettera pas son séjour dans cette belle région du Doubs !

Nous avons rencontré Théo Denier pour lui poser quelques questions :

 Qui a eu cette idée disons novatrice ?

C’est un projet qui a évolué au fil du temps. C’est parti de la sphère privée: On a (avec ma copine) acheté une grosse ferme en 2015, très proche de la vallée de la Loue et de ses belles falaises en pleine expansion. A la base, l’idée était de faire un gros pan pour pouvoir inviter les copains, se faire des supers séances « à la maison ». Puis, voyant l’engouement soulevé par cette idée, on a décidé de créer une association: comme on est aussi des falaisistes acharnés, on a intégré cet aspect aux statuts de l’association: promouvoir les sites naturels à travers diverses actions en falaise: organisation d’évènement, équipement etc. Bref, une association à la frontière des « deux mondes » de l’escalade (pratique indoor et outdoor) afin de les réunir le plus souvent possible !

Un dossier plus complet présente le projet associatif sur le site ( http:// climbingcomtois.wixsite.com/letuye/l-association ).

Les grimpeurs locaux ont-ils rapidement adhéré au projet ?

Oui, complètement: les salles de bloc sont encore assez rares dans la région, le projet a donc assez rapidement suscité l’intérêt des locaux. On a ainsi eu plein de coups de mains, ponctuels ou réguliers des grimpeurs doubistes. Un grand merci à toutes ces personnes, au passage !

Comment avez-vous financé le projet ?

Dans un premier temps toute la salle a été financée par des fonds privés (une partie de notre prêt immobilier pour être précis!). Ainsi, on a pu réaliser l’ossature, l’isolation, la structure grimpable et se constituer un stock de prises et de volumes de base… Quelques dons divers (matelas, prises, mobilier d’occasion etc.) ont étoffé ce premier investissement. Le second temps démarre bientôt: l’association est créée et sera locatrice (à titre gratuit) de la salle. Une campagne d’adhésion anticipée et/ou de dons au bénéfice de l’association va être lancée très prochainement: l’idée est de lever les fonds nécessaires à l’achat de prises et volumes supplémentaires pour avoir un stock qui nous permettra de fonctionner quelques années.

 On a vu beaucoup d’ingéniosité et de débrouillardise dans vos vidéos pour limiter les coûts je suppose (tapis…), que vous manque-t-il aujourd’hui ? De quoi avez-vous besoin ?

Comme évoqué précédemment, il nous reste à financer des prises et des volumes pour étoffer le stock déjà constitué (on dispose déjà d’environ 2000 prises neuves et d’occasion et une bonne cinquantaine de volumes bois artisanaux sont en cours de fabrication) D’autres éléments manquants seront également financés, mais à titre privé: L’achat d’une bâche pour recouvrir les matelas, la mise aux normes électrique et l’acquisition d’un système de chauffage adapté.

Quels ont été les plus gros problèmes pour mettre en œuvre ce projet ?

Le principal a été le temps, pas toujours facile à trouver pour faire avancer le projet ! Ca fait donc bientôt deux ans que l’on a commencé, on est donc beaucoup moins rapide que ces salles qui poussent comme des champignons dans les grandes villes ! Mais le projet n’est pas le même alors les grimpeurs sont patients !

 

On revient souvent au problème de sécurité et de responsabilité. Le mur est-il aux normes ?

 La question des normes a été centrale: d’une part un dossier a été monté pour que la salle soit reconnue E.R.P. (Etablissement recevant du public: normes de sécurité incendie et accessibilité). De l’autre, on s’est basé sur le texte de normalisation des salles de bloc (la fameuse NF EN 12572-2 !) pour la conception de la salle: respect des hauteurs maximales, de l’épaisseur et de la surface du tapis de réception, etc.

A quand la première compèt ?

La première compèt’ c’est pour bientôt ! Probablement dans l’été ou le début de l’automne 2017, un évènement qui sera à la croisée du pan et de la falaise, on en dit pas plus pour l’instant !

Plus largement, le Doubs ce n’est pas l’Espagne ? On est loin des falaises à la mode dans l’inconscient collectif ? Toi qui vis là-bas, peux-tu nous vendre ta région ?

C’est pas l’Espagne, c’est beaucoup mieux ! Blague à part, il y a plein de falaises ici qui n’ont rien à envier à d’autres bien plus connues. Rurey et Clémont ont déjà été mises en lumière mais il y en a d’autres… avec souvent un beau calcaire et des paysages tops ! Pour se faire une idée, allez jeter un coup d’œil au site comtois climbing (qui est d’ailleurs géré par l’association) où on trouve pas mal de photos (http://climbingcomtois.wixsite.com/ comtoisclimbing).

 

Vous semblez vous éclater dans cette belle région. On observe que vous ouvrez beaucoup, que des nouvelles falaises voient le jour mais vous communiquez finalement assez peu. La stratégie c’est vivons cachés pour vivre heureux ?

 Certes, on s’amuse bien! Il y a beaucoup de caillou vierge ici alors on en profite… Parmi nos sites, certains sont, comme dans la plupart des régions, des « spots secrets » sur lesquels on évite toute communication autre que le bouche à oreille… sans pour autant tomber dans l’avarice car on est très content de voir des visiteurs dans les falaises! Mais la majorité des sites sont officiellement autorisés à la pratique et la faible communication à leur sujet vient simplement du fait que les grimpeurs d’ici n’ont pas cette tradition médiatique qu’a par exemple l’Alsace, une de nos voisines. Pas de rubrique dans Grimper ni de site internet très fréquenté ou de grimpeurs emblématiques … C’est plus un état de fait qu’une volonté de la part des locaux.

L’association a d’ailleurs comme but de promouvoir ces sites dans les années à venir. Alors, en attendant de futurs articles, libre aux curieux de devancer « la masse » et de venir nous découvrir! Accueil chaleureux garanti !

Allez, une dernière pour la route : le Tuyé, c’est en prévision des JO ou vous êtes plutôt contre ?

Evidemment, on espère d’ailleurs un podium 100% franc-comtois à Tokyo ! Plus sérieusement, il est clair que ces J.O. sont motivés par des enjeux qui nous dépassent: sponsors, audience télévisuelles etc… Mais ça peut participer à l’essor de l’escalade alors pourquoi pas…. à condition de ne pas dénaturer trop profondément la pratique actuelle!

 

Le Tuyé est une initiative riche en enseignements qui peut nous amener à réfléchir sur le sens du vent actuel. Sans critiquer ou remettre en cause le fonctionnement de l’escalade  et l’explosion des salles privées dans les grandes villes, le Tuyé nous rappelle que la vie associative n’est pas morte. Consommer l’escalade peut avoir du bon, mais vivre l’escalade au travers un projet, un club, une expé donne du sens à notre vie et vous assure, à n’en pas douter, des souvenirs impérissables.

Le tuyé, c’est aussi vous l’aurez compris, un projet qui rassemble et qui crée du lien entre les Hommes. Une idée de la vie rétrograde ? non !! Innovante…

Je souhaite longue vie au Tuyé avec un brin de jalousie dans la voie.

Publié le : 12 février 2017 par Vincent

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